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du 67° vers le nord, et de là vers le sud, le long de la côte d’Amérique, jusqu’au 36° et demi ». Herrera, historien espagnol digne de foi, affirme que Cabot navigua jusqu’au 68°[1].

Le second fait que l’auteur s’attache à constater, c’est que Cabot visita la baie d’Hudson. On lit en effet, dans le Traité de sir Humphry Gilbert sur le passage du nord-ouest[2], reproduit par Hakluyt, « que Cabot avait tracé et décrit ce passage sur une carte, conservée dans la galerie privée de la reine, à Whitehall, qu’il y était entré et avait navigué vers l’ouest, un quart nord sur la côte septentrionale de la terre de Labrador, et que, le 11 juin, étant arrivé par latitude 67° et demi, et trouvant la mer encore libre, il allait et aurait pu cingler vers Cataia, sans la mutinerie du maître et de l’équipage de son navire. »

Le célèbre Ortelius a figuré sur sa carte (America, sive Novi Orbis descriptio)[3] la forme de la baie d’Hudson et le canal qui s’étend de son extrémité septentrionale vers le pôle ; or, la publication de cette carte précéda de long-temps les voyages de Hudson et de Frobisher, et Ortelius affirme les avoir représentés d’après la carte de Cabot, qu’il avait eue sous les yeux.

Galvauo, auteur portugais, dont le témoignage ne saurait être taxé de partialité, dit que « Cabot navigua directement au nord jusqu’au 60° de latitude, où les jours ont une durée de dix-huit heures, et les nuits sont très claires. Il y rencontra de grandes îles de glace, mais ne put parvenir à trouver fond avec un câble de cent brasses de longueur. Ayant remarqué que la terre tournait en cet endroit à l’est, il la côtoya, découvrit la baie et la rivière de Deseado, et chercha à s’assurer si celle-ci ne passait point de l’autre côté. Il retourna de là sur ses pas, jusqu’au 38°, vers la ligne équinoxiale, et revint en Angleterre. »

Le mot portugais deseado, qui signifie désiré ou cherché, indique suffisamment, suivant l’auteur, quelle était cette baie. Quant à la direction orientale que, selon Cabot, la côte prenait à cette latitude, il a été démontré dernièrement, par le navigateur anglais Parry, que cette observation était exacte.

L’auteur justifie ensuite Cabot du reproche que lui font plusieurs écrivains, de n’avoir point publié de récit de son voyage. Sa justification est tout entière, dit-il, dans ce passage de Hakluyt : « Le compte, dit cet historien, que je viens de rendre des découvertes de Sébastien Cabot, satisfera pour le moment la curiosité de mes lecteurs ; mais bientôt, Dieu aidant, seront publiés toutes ses cartes et discours, tracés et exécutés de sa main, qui sont en la possession de l’honorable maître William Worthington, un des pensionnaires de sa majesté, lequel, ne voulant pas que de si précieux monumens restent ensevelis dans un éternel oubli, consent volontiers à les laisser consulter et publier pour l’encouragement et l’instruction de nos compatriotes. »

Ce William Worthington était un gentilhomme de la cour d’Édouard vi,

  1. Décade i, liv. vi, ch. 16.
  2. Publié en 1576.
  3. Voyez son Theatrum orbisterrarum.