sanguine soient les seules conditions de capacité à traiter les affaires publiques ? Faut-il bannir la raison et l’étude, ne nous occuper que de querelles de château et de révolutions de portefeuilles ? Toute vue large sur la politique du monde est-elle proscrite ? N’est-il plus de leçons profitables à tirer de l’histoire contemporaine ?
Enfin le ministère veut-il nous obliger à demander au cautionnement tout-puissant de 1,500 francs de rentes un brevet d’intelligence des affaires pratiques ? veut-il que nous quittions la science pour l’action, l’étude pour la polémique ardente et impitoyable, et compter un adversaire de plus ?
Tout cela est pour nous un obscur problème que le procès éclaircira. Nous nous sommes étendus sur ce point, et en voici la raison :
Encore un coup, la chronique du 15 mars n’est que le prétexte ; c’est le côté faible, démasqué et visible, par lequel on se flatte d’entrer facilement dans la place. Si nous en croyons des bruits dignes de toute confiance, l’objet réel et caché du ressentiment ministériel est plus grave et plus considérable ; il ne s’agit de rien moins, dit-on, que des lettres sur Constant et sur Périer, du pseudonyme West-End-Review. L’attention vive que ces Lettres ont excitée en France et à l’étranger, et l’annonce de prochaines Lettres sur M. de Villèle et sur les principaux hommes d’état qui dirigent aujourd’hui le cabinet, auraient éveillé, dit-on, certaines susceptibilités très irritables. On redoute cette manière digne et large de procéder ; on est fait aux assauts du matin et du soir et aux tours d’escrime des petits journaux ; mais contre un déploiement si imposant d’intelligence des faits et de forte raison il n’y a pas de parade. Une lettre semblable, c’est un coup de canon.
Ceci nous étonne pourtant. À tout prendre, il est plus d’un homme d’état qui doit gagner, à cette étude approfondie de sa vie politique saisie dans son ensemble et mise en relief, une illustration plus étendue et plus vivace que celle à laquelle il aurait eu droit. Est-ce donc cette illustration même qui gêne et qui inquiète ? S’il en est ainsi, nous n’y pouvons rien.
La loi de 1828[1] exempte de la garantie du cautionnement les journaux et écrits périodiques exclusivement consacrés aux travaux et aux re-
- ↑ L’unique motif que M. Portalis put apporter à l’appui de la présentation de cette loi est curieux à rappeler :
Les journaux, disait-il, circulent avec une étonnante rapidité. Peu de temps suffit pour les lire (chacun de nos numéros compte 120 pages) ; ils sont l’écrit de la circonstance, l’expression du fait de la veille, l’histoire de l’évènement du jour (nous