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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 2.djvu/353

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REVUE. — CHRONIQUE.

mes Stuart sur les reproches faits aux mœurs des États-Unis en général, suffira pour mettre le lecteur à même de juger entre lui et mistress Trollope. On rencontre quelquefois dans ce pays des Européens qui pensent comme cette dame. L’un d’eux a donné occasion à M. James Stuart de faire les réflexions suivantes :

« Mon opinion est que tout individu ayant les habitudes et la position sociale de M. Philips préférera le genre de vie auquel il est accoutumé à celui de ce pays ; mais cela ne fait rien à la question. Les Américains sont si complètement absorbés par leurs affaires, qu’ils trouvent rarement le temps de s’asseoir et de se livrer à la conversation pendant deux ou trois heures de suite ; une longue habitude leur fait préférer de fumer et de boire leur grog, non d’une manière suivie, mais de temps à autre, lorsqu’ils s’y sentent disposés.

« M. Philips veut plaisanter et se trompe complètement lorsqu’il accuse les Américains de n’être pas gentlemen, parce que leur manière de vivre n’est pas la sienne. Son erreur provient de ce qu’il croit que ce terme ne doit s’appliquer qu’à ceux qui vivent comme il aimerait vivre, ou comme il vivait dans son pays. Le même préjugé se rencontre fréquemment parmi des personnes de toutes les classes et les suit aussi bien dans les autres contrées qu’elles visitent, qu’en Amérique. Le mot de gentleman est connu également des voleurs de grand-chemin ou des filous et du plus fier aristocrate que nous possédions en Angleterre. Ces deux classes de personnes ne diffèrent que sur le sens de cette expression. Mais si on lui donne la signification généralement admise, c’est-à-dire celle qui la rend applicable à tout individu ayant reçu une bonne éducation et doué de bonnes manières, j’ose affirmer, sans crainte d’être contredit de ceux qui connaissent la masse de la population des États-Unis, au nord et au sud, à l’est et à l’ouest, que cette immense contrée renferme un beaucoup plus grand nombre de gentlemen que tout autre pays qui existe ou a existé à la surface du globe. Je suis heureux de voir, dans cette occasion, mon opinion partagée par l’un des derniers voyageurs anglais en Amérique, M. Ferrall, qui dit : « qu’aux États-Unis on ne voit que des gentlemen. »

« Les États-Unis sont le pays le plus séduisant pour l’homme pauvre, mais industrieux et capable de travailler ; il a la certitude d’y obtenir des droits politiques, une position et de l’aisance. Il n’est donc pas étonnant que tous les individus de cette grande nation, vieux torys ou simples parvenus, soient également disposés à maintenir les choses telles qu’elles étaient ou sont actuellement, assurés qu’ils sont qu’ils reçoivent beaucoup en échange du peu qu’ils cèdent à la masse de leurs concitoyens. M. Ferrall a parfaitement compris ce que je cherche à expliquer, lorsqu’il dit