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NOUVELLES EXPÉDITIONS ANGLAISES.

Buenos-Ayres. Fatigué, au bout d’un an, de sa spéculation, il l’abandonna et fut remplacé par un Français, nommé Vernet, établi à Buenos-Ayres, qui obtint du gouvernement un privilége pour vingt années, et se rendit sur les lieux avec un certain nombre de gauchos et de chevaux accoutumés à chasser le bétail sauvage. Les maisons dont nous voyions sortir de la fumée étaient celles de l’ancien établissement français dont les habitans actuels avaient réparé les murs et le toit. Vernet faisait de bonnes affaires, lorsque l’ordre arriva de Buenos-Ayres de saisir tous les bâtimens naviguant près de ces îles, ainsi que sur la côte de la Terre de Feu et de Patagonie[1]. Ce décret devint l’origine d’une dispute entre la république Argentine et les États-Unis, dont trois navires avaient été saisis et vendus à l’encan. Lorsque le premier de ces bâtimens arriva à Buenos-Ayres, le capitaine Duncan, commandant la Lexington, en demanda la restitution et une indemnité ; n’obtenant aucune réponse satisfaisante, il fit voile pour Berkeley, s’empara de tous ceux qui avaient pris part à la capture des navires, et emmena leurs chefs aux États-Unis pour y être jugés comme pirates, après avoir désarmé le reste de la population. Cet événement fut fatal à Vernet, qui non-seulement perdit la plupart des hommes qui lui avaient été enlevés de force, mais encore beaucoup d’autres qui le quittèrent pour retourner à Buenos-Ayres. Le gouvernement de cette république envoya alors, pour protéger l’établissement, un détachement de soldats sous les ordres d’un colonel et d’un officier subalterne. Ce détachement se composait en partie d’hommes dont les crimes rendaient l’expulsion hors du pays nécessaire. Le résultat de ce choix impolitique fut un complot contre les autorités de l’île et l’assassinat du commandant. L’établissement resta ainsi à la merci de cette troupe de scélérats jusqu’à ce qu’un bâtiment français, arrivé une semaine avant nous, s’empara des chefs, et les envoya prisonniers à Buenos-Ayres.

  1. Ici l’auteur s’exprime trop vaguement et d’une manière inexacte. Ce décret ne regardait que les bâtimens qui venaient faire la pêche du phoque sur les côtes de Patagonie et aux Malouines, dont Buenos-Ayres réclame la propriété. Les Anglais et les Américains venaient faire cette pêche jusqu’aux portes de Montevideo au détriment des habitans du pays.