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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 1.djvu/383

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ANCIENNE LITTÉRATURE ITALIENNE.

dent la pensée. Il semble qu’aujourd’hui le tour de Dante soit venu.

Dernièrement je rencontrai un Italien, homme recommandable par ses connaissances littéraires et par la gravité de son esprit. « Avez-vous terminé votre ouvrage sur la poésie dantesque ? me demanda-t-il. — Oui et non. — Que voulez-vous dire ? — Que l’ayant cru fini, il y a quatre ans, j’ai cessé d’y travailler depuis cette époque, mais que j’ose à peine en lire des fragmens à mes amis, tant je me sens averti par un instinct secret que je n’ai pas entièrement rempli la tâche que je me suis imposée. — Vous avez lu les Essais sur Pétrarque et le Parallèle entre ce poète et Dante, par Ugo Foscolo ? — Sans doute. — Connaissez-vous aussi le livre que Gabriele Rossetti a publié à Londres l’année dernière ? — Non. — Eh bien ! mon ami, lisez-le. C’est une précaution indispensable pour vous, puisque vous écrivez sur Dante. — Mais quel est ce livre ? Qu’apprend-il de nouveau ? — Lisez-le, me répéta l’Italien, et vous m’en direz votre opinion, car, pour moi, je serais encore fort embarrassé de vous exprimer ce que j’en pense. Lisez, lisez… adieu. »

L’air d’attention réfléchie qu’il avait eu, tout en prononçant ces derniers mots et en me serrant la main, excita vivement ma curiosité. À l’instant même, je courus chez le libraire Baudry qui me trouva le livre de Gabriele Rossetti, ouvrage assez rare à Paris.

Depuis l’âge de dix-huit ans, je n’ai certainement pas éprouvé un accès de curiosité littéraire plus vif que celui que je ressentis lorsque je me vis possesseur du livre de Rossetti. Je me fis céler ; et toutes les précautions prises pour être à l’aise et tranquille, je me mis à dévorer mon grand in-8o anglais de 460 pages.

En voici le titre un peu long et les conclusions étranges ; on lit en tête du livre : De l’esprit anti-papal qui produisit la réforme, et de l’influence secrète qu’il exerça sur la littérature de l’Europe et particulièrement sur celle de l’Italie, comme on peut s’en convaincre par l’examen de beaucoup d’auteurs classiques italiens, et en particulier de Dante, de Pétrarque et de Boccace ; par Gabriele Rossetti, professeur de langue et de littérature italienne au collège du roi à Londres. — Londres, 1832.

De la première page je passe à la fin du volume, où l’auteur se résume à peu près en ces termes : « Tous les ouvrages, dit-il, tels que ceux de Pythagore, des prophètes, tels que l’Apocalypse, la