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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 1.djvu/610

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avant lui, le mirent en rapport avec les tribus indiennes des Pampas, et même avec celles du détroit de Magellan, qui parfois s’avancent, dans leurs courses aventureuses, jusque dans les environs du Rio-Negro. Revenu encore une fois à Buenos-Ayres, notre voyageur eût désiré se rendre par terre au Chili, en traversant les Pampas et les Andes ; mais la guerre civile qui régnait alors dans le pays, lui fermant cette voie, il fut obligé de confier de nouveau sa fortune à la mer, et au commencement de 1830 il débarqua à Valparaiso. M. d’Orbigny ne s’arrêta qu’un instant au Chili ; s’embarquant de nouveau, il visita les ports des Intermedios, Cobija, Arica ; et de ce dernier s’enfonçant dans l’intérieur, il se dirigea sur La Paz dans le Haut-Pérou, et peu de temps après à Cochabamba et Santa-Cruz de la Sierra jusques au centre de l’Amérique Méridionale. Ici commence une suite de travaux qui seront particulièrement utiles à la géographie, à l’histoire naturelle et à l’histoire de l’état actuel de cette partie de l’Amérique, sur laquelle les missionnaires espagnols seuls nous ont à peine donné quelques détails aujourd’hui en grande partie surannés. Pendant deux ans, M. d’Orbigny parcourut cet immense territoire ; il traversa à l’est le pays des Chiquitos jusques sur les bords de la lagune Xarayes où le Paraguay prend sa source ; au nord, le pays des Guarayos et des Moxos où existent un grand nombre de villages indiens gouvernés par des missionnaires d’après les mêmes usages que les anciennes missions du Paraguay, et il descendit le Rio-Mamoré jusqu’à sa jonction avec le Rio-Madeira, l’un des plus majestueux affluens de l’Amazone. Revenant sur ses pas, l’infatigable voyageur s’arrêta dans quelques lieux du Haut-Pérou, principalement sur les bords du lac Titicaca, le plus élevé de ceux qui existent sur le globe, à Potosi, Chuquisana, etc., et vers le milieu de l’année dernière il se trouvait à Arica prêt à revenir en France où le rappelait l’administration du Muséum. Un navire se présenta qui, après l’avoir conduit à Lima, le ramena à Valparaiso, d’où il a dit adieu à l’Amérique.

Plus heureux que les Duvaucel et les Jacquemont, comme lui intrépides et infatigables, mais condamnés par le sort à ne plus revoir leur patrie, M. d’Orbigny a pu saluer la France après plus de sept ans d’absence. De riches collections de toute espèce en ce moment déposées au Muséum, des vocabulaires de plus de vingt-cinq langues indiennes, des manuscrits de missionnaires sur le même sujet et sur l’histoire du pays, enfin d’innombrables observations et dessins dans un ordre parfait, tels sont les matériaux de la relation que va publier M. d’Orbigny, et dans laquelle il a bien voulu puiser à l’avance quelques détails pour en enrichir nos pages.