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REVUE DES DEUX MONDES.

Moïse : Fiat firmamentum medio aquarum ; et dividat aquas ab aquis. Et fecit Deus firmamentum divisitque aquas quæ erant sub firmamento, ab his quæ erant super firmamentum[1]. Il y ajoute d’autres textes tirés de la Genèse et des Psaumes[2].

Plusieurs Pères refusèrent de s’attacher à la lettre de ces textes, et Origène, par exemple, prétendit que par les eaux placées au-dessus du firmament, il fallait entendre certaines classes d’anges ; opinion que saint Augustin combat fortement[3]. Le plus grand nombre des Pères s’en tint au sens littéral de ces textes[4] ; et bien qu’ils sentissent toutes les difficultés d’une telle disposition, comme on le voit par tout ce que saint Basile[5] et saint Augustin[6] s’opposent à eux-mêmes, ils n’en crurent pas moins que les eaux célestes étaient soutenues par le firmament, qui avait des portes et des fenêtres. Car c’est ainsi qu’on interpréta les termes de cataractes ou de fenêtres du ciel, qui se trouvent dans la Genèse et les Psaumes[7] : on conçut que, par ces ouvertures, les eaux du ciel tombaient sous forme de pluie, à la volonté ou par les ordres de Dieu ; cette disposition, admise aussi dans la cosmographie populaire des Grecs, et dont Aristophane nous a donné une expression burlesque[8], fut regardée comme la condition indispensable de toute cosmographie prétendue ortho-

  1. Genes. i, 6.
  2. Laudate eum cœli cœlorum et aquæ omnes quæ super cœlos sunt. Psalm. cxlviii, 5. — qui tegis aquis superiora ejus. ciii, 3. — et mandavit nubibus desuper, et januas cœli aperuit. lxxvii, 23.
  3. De civ. Dei, xi, 34, p. 1113.
  4. Selon l’abbé Bergier, savant professeur en théologie, auteur du Dictionnaire de Théologie de l’Encyclopédie (art.  ciel, et eaux), ce sont les incrédules qui ont prêté à Moïse l’idée que le ciel est une voûte solide recouverte d’une couche d’eau et percée de trous, etc. Ce docte théologien n’a pas songé qu’il range ainsi d’un trait de plume presque tous les Pères de l’église parmi les incrédules.
  5. In Hexaem. iii, 7, p. 29.
  6. In Genes. ii, c. 4.
  7. Genes. vii, 11 ; viii, 2. — Psalm. lxxvii, 27. — Cf. Schleusn. Nov. Thes. Vet. Test. T. iii, p. 91, 251, 252.
  8. Aristoph. Nub. v. 372.