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COSMOGRAPHIE.

ad locum suum revertitur : ibique renascens gyrat per meridiem, et flectitur ad Aquilonem : lustrans universa in circuitu, pergit spiritus et in circulos suos revertitur. Jean Philoponus[1] nous assure que certains auteurs voyaient, dans ce texte, la preuve que le soleil ne passe pas sous la terre quand il est couché, et s’en servaient pour établir un système tout pareil à celui que Cosmas a exposé dans son ouvrage. Jean Philoponus, après avoir montré que ce texte peut facilement s’expliquer dans le système de Ptolémée, se moque de l’opinion de certain auteur qui, prenant à la lettre les paroles de Salomon, se figurait que le soleil, arrivé le soir au terme de sa course, sort du ciel, glissant derrière cette voûte solide qui le cachait à nos yeux, et va regagner le levant, où il se retrouve le matin[2]. Il est curieux de voir, après tant de siècles, reparaître une des notions favorites de la cosmographie des poètes grecs. Cette idée, que le soleil sort du ciel pour aller rejoindre par derrière le point de son lever, n’est-elle pas identique avec l’ancien mythe, dont les traces se trouvent dans des fragmens de Pisandre, de Mimnerme, d’Eschyle, d’Antimaque et de Phérécyde[3], d’après lequel Hélios, sortant du ciel par la porte du levant, parcourait obliquement l’atmosphère, jusqu’à la porte du couchant : là il rentrait dans le ciel, et, s’embarquant avec son char et ses coursiers sur un vaisseau d’or, voguait pendant la nuit le long de cette voûte de métal, et revenait à la porte opposée ? Mais il y a bien d’autres exemples de cette réapparition des idées primitives et poétiques.

Jean Philoponus ne nomme point celui qui avait tiré une conséquence si singulière du passage de Salomon. Je crois qu’il avait en vue Sévérianus de Gabala, à moins qu’une pareille idée n’eût passé par la tête de plusieurs, ce qu’assurément je ne voudrais pas nier. Quoi qu’il en soit, il me paraît certain que l’évêque de Gabala expliquait en ce sens le texte de l’Ecclésiaste. « Cherchons, dit-il, où le soleil se couche, et où il va pendant la nuit. Selon les païens, il passe sous la terre ; mais, selon nous, qui disons que

  1. Creat. Mundi, iii, 10, p. 122.
  2. iii, 10, p. 126.
  3. Ap. Athen. xi, p. 469, 470.