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Parise, soit qu’il analyse les maladies des gens de lettres, soit qu’il indique les moyens de s’en défendre, donne aux excès de la contractilité et à ses effets plus d’importance qu’aux influences de la sensibilité. S’il remarque une altération organique, elle est causée par l’abus de la volonté, et non par l’action atténuante que les sensations peuvent exercer. Le régime qu’il ordonne consiste dans une certaine abstinence, ou dans un exercice déterminé du libre arbitre. Ceci ne nous paraît point s’accorder facilement avec la prééminence accordée tout à l’heure à l’influence de la passivité humaine.

Indépendamment de tous les faits observables possibles, en vertu même du sentiment psycologique de la vie que chacun porte en soi, nous oserons affirmer a priori que la loi fondamentale du tempérament des artistes ne peut être appréciée complètement au point de vue physiologique. C’est qu’en effet le sentiment de l’art nous paraît être bien plus un mouvement du dedans au dehors, qu’une impression du dehors au dedans. Au reste, la vie normale des hommes se produit généralement ainsi. M. Reveillé-Parise le reconnaît : « Possesseur du corps, le moi, ou l’homme ordonne à son sang de circuler plus lentement, à ses nerfs d’être moins irritables, au cerveau de méditer telle idée plutôt que telle autre. Le moi, par sa force intrinsèque, ou aidé de l’éducation et des secours de la philosophie, de la médecine, commande, régit souverainement l’économie ; en définitive, comme on l’a dit, l’homme est le maître chez lui. » — S’il est vrai que le génie soit un développement extraordinaire de la vie, il faudra bien convenir qu’il est l’expression d’une liberté particulièrement impérieuse. Mais cette définition, une fois admise, nous semblerait exiger qu’on déplaçât les bases sur lesquelles M. Reveillé-Parise a fondé le tempérament de ses malades.

Après tout, ce livre est un travail très-distingué et profitable. Même, sur le terrain métaphysique où nos chicanes l’ont attiré, il est infiniment plus remarquable que les ouvrages ordinaires de la science. C’est un pas fait au-delà de l’analyse vers une estime plus générale des causes originelles.


Nous ne pourrions accorder les mêmes éloges au Sourd-Muet de M. Paulmier[1]. C’est un beau livre sans doute, puisqu’il parle d’humanité souffrante et soulagée. Mais on est aussi trop forcé de lui chercher ce mérite-là.

Il y a plusieurs années déjà que M. Bébian, professeur à l’Institut des Sourds-Muets, publia un ouvrage clair et court, ou étaient exposés

  1. Le Sourd-Muet, par L. P. Paulmier, 1 vol. in-8o.