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REVUE. — CHRONIQUE.

Quant à M. Peel et à lord Lyndhurst, qui ont été vus, par un journal de Paris, en haut lieu, et fort occupés, d’accord avec le ministère français, à fabriquer un ministère tory, nous pouvons assurer que, dans leur court séjour de douze heures, ils ont songé à tout autre chose. Les hommes d’état de l’Angleterre qui appartiennent au parti tory, et qui ont quelque capacité, sont si loin de songer à rentrer au ministère, que l’un d’eux conseillait dernièrement au duc de Cumberland de réaliser de grosses sommes pour acheter des terres, en qualité de colon libre, à Botany-Bay. « Pour moi, je vais le faire, ajoutait-il. — Et pourquoi à Botany-Bay ? demanda le prince. — Parce qu’il vaut mieux y vivre en colons qu’en déportés, et que nous le serons très incessamment. »

Une sorte de superstition s’attache à l’incendie du parlement en Angleterre. On regarde cet évènement comme l’indice d’une révolution prochaine, et ce n’est pas tout-à-fait sans raison. Il paraît, en effet, que l’enquête sur cet incendie, dont on s’occupe en ce moment, et qui n’a pas encore été rendue publique, offre déjà des incidens à la fois curieux et menaçans. Le dernier bill au sujet des pauvres ne serait pas étranger à cette catastrophe. Ce bill, qui oblige les pauvres qui reçoivent des secours des communes, à habiter les maisons de dépôt, rend leur situation encore plus affreuse, en ce que, pour les six shellings qu’ils reçoivent chaque semaine, ils sont contraints d’abandonner les travaux d’atelier auxquels se livraient la plupart d’entre eux. Des menaces recueillies par les commissaires de l’enquête, la connaissance qu’on avait de l’incendie à Birmingham le jour même de l’évènement, et d’autres indices, indiqueraient suffisamment d’où est parti le coup. Dans plusieurs comtés de l’Angleterre, il est déjà question d’incendies considérables, et l’alarme est répandue partout. On compte beaucoup sur les premiers actes du prochain parlement pour diminuer le mécontentement des classes populaires.

Il est certain que la translation du parlement dans un nouveau local influera sur la nature de ses discussions. Cette antique chambre oblongue, où le jour pénétrait à peine, qui ne contenait pas tous les membres de la représentation nationale, qui n’avait rien de solennel et de théâtral comme les constructions modernes, modérait en quelque sorte les orateurs, et donnait à l’assemblée un certain air de réunion de famille qui tuait l’esprit d’emphase et de déclamation. Qui sait le caractère que prendront les séances dans un autre lieu ? Et si les dispositions d’un nouveau local forçaient l’orateur à s’adresser à l’assemblée, au lieu de parler au président, comme on fait à Londres, quelle tournure personnelle ne prendraient pas les discussions, et qui peut prévoir la nature des motions qui seraient