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UNE BONNE FORTUNE.

xxvii.

Elle s’arrêterait là-bas, sous la tonnelle.
Je ne lui dirais rien, j’irais tout simplement
Me mettre à deux genoux par terre devant elle,
Regarder dans ses yeux l’azur du firmament,
Et pour toute faveur la prier seulement
De se laisser aimer d’une amour immortelle.

xxviii.

Comme j’en étais là de mon raisonnement,
Enfoncé jusqu’au cou dans cette rêverie,
Une bonne passa, qui tenait un enfant.
Je crus m’apercevoir que le pauvre innocent
Avait dans ses grands yeux quelque mélancolie.
Ayant toujours aimé cet âge à la folie,

xxix.

Et ne pouvant souffrir de le voir maltraité,
Je fus à la rencontre, et m’enquis de la bonne
Quel motif de colère ou de sévérité
Avait du chérubin dérobé la gaieté.
Quoiqu’il ait fait, d’abord, je veux qu’on lui pardonne,
Lui dis-je, et ce qu’il veut, je veux qu’on le lui donne.

xxx.

(C’est mon opinion de gâter les enfans.)
Le marmot là-dessus, m’accueillant d’un sourire,
D’abord à me répondre hésita quelque temps ;
Puis il tendit la main, et finit par me dire
« Qu’il n’avait pas de quoi donner aux mendians. »
Le ton dont il le dit, je ne peux pas l’écrire.