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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/169

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ALGER.

aux égards de ces deux puissances que de nous départir d’intérêts qu’elles regardent comme connexes, à beaucoup de titres, avec les leurs. Si nous savons administrer Alger, tout ce qui se rattache à cette position constituera bientôt une de ces questions que les diplomates appellent séparées ; sur lesquelles on est d’accord quand on est en mésintelligence sur le reste ; et par lesquelles des négociations inquiétantes sont souvent ramenées dans des voies de conciliation.

Ces considérations autorisent peut-être à conclure que l’abandon d’Alger n’a pu être proposé que faute d’un examen complet de la question et l’accueil réservé à cette opinion dans l’armée, dans la marine et dans la population du midi de la France, l’empêchera sans doute de se reproduire.

L’expédition d’Alger pouvait avoir trois objets : l’anéantissement de la piraterie, l’exploitation commerciale du nord de l’Afrique, la colonisation agricole, telle à peu près que la firent les Romains, et la réalisation successive de ces trois objets semble devoir faire passer la régence par trois états différens.

L’occupation militaire des principaux points de la côte suffit pour garantir la sécurité de la Méditerranée. Ce but est aujourd’hui atteint, un peu chèrement, il est vrai ; mais, quoi qu’on en dise, nous n’avons point été au-delà et si nous avons assez fait pour la paix de la mer, tout semble à faire du côté de la terre. Les résultats obtenus sur le premier point doivent nous encourager à franchir un second degré.

Négocier avec le grand-seigneur ; étendre à toute la régence les traités relatifs à nos anciennes concessions, aplanir ainsi les barrières qui séparent de nous les populations mahométanes, voilà la meilleure base à donner aux opérations ultérieures. Les exemples qu’ont laissés, à cet égard, Richelieu, ce bon gardien des intérêts et de la dignité de la France, et Amurath le conquérant (elghazy), peuvent être proposés, sans qu’à Paris ou à Constantinople personne ait aujourd’hui le droit de s’en trouver blessé. L’organisation turque, dirigée dans des vues de progrès et de civilisation, suffit, à l’égard des campagnes, à tous les besoins actuels ; bien comprise, elle ôte la place aux collisions, nous met vis-à-vis des indigènes dans l’heureuse impossibilité de mal faire et ne leur laisse que des rai-