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LA QUENOUILLE DE BARBERINE.

BARBERINE.

Je crois que vous êtes un grand enchanteur, car il est impossible de ne pas faire ce que vous voulez. Écoutez-moi ; si mon mari savait que vous m’avez parlé d’amour, il me tuerait infailliblement. Pour que personne dans ce château ne puisse en avoir un soupçon, demain, à l’heure du dîner, vous choisirez votre temps pour entrer dans la grande tour, là où vous verrez, taillées en marbre, les armes du royaume. Vous trouverez ouverte la porte de la chambre d’en haut, vous y entrerez, et vous la fermerez sur vous. De mon côté, au bout d’un quart d’heure… Silence ! on nous écoute. Séparons-nous, et n’y manquez pas.



Scène IV.

Un camp.
Entrent ULRIC et quelques chevaliers.
ULRIC, à part, regardant le miroir.

C’est bien elle, je ne puis détacher mes yeux de cette glace. Oui, voilà Barberine ; je distingue ses traits, son visage ; ah ! je frissonne ; cette image a-t-elle bien toute sa blancheur, symbole de la fidélité ? n’y a-t-il point quelque teinte jaunâtre ? que Dieu me préserve !

UN DES CHEVALIERS.

Personne ne s’est autant montré que vous, seigneur comte, dans cette dernière bataille ; la faveur dont le roi vous honore doit remplir votre cœur ; un avancement si rapide, si glorieux ! votre fortune est dans vos mains.

ULRIC, à part.

La figure devient jaune. (Haut.) Excusez-moi, seigneurs, si mon esprit préoccupé…

UN AUTRE CHEVALIER.

À propos, votre fameux pari avec le seigneur de Rosemberg n’est pas encore terminé ? nous l’avons appris en Turquie ; tout le monde en jasait.

ULRIC, à part.

Cependant je ne sens pas cette odeur désagréable dont parlait Polacco, et qui est le dernier signe de l’infidélité. (Haut.) Dites-moi, messieurs, ne sentez-vous pas quelque odeur singulière ?