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Tel est le texte donné par M. Champollion ; mais M. Champollion a mal lu, ou le manuscrit est fautif en cet endroit. Il est évident qu’il doit y avoir : « Secont ce que nouz dit et raconte le sage Phylosofo. » Il ne s’agit pas là d’un précepte de philosophie, mais d’une opinion du philosophe, c’est-à-dire d’Aristote, dont la Métaphysique commence en effet par cette phrase : « Tous les hommes ont un désir naturel de savoir, comme le témoigne l’ardeur avec laquelle on recherche les connaissances qui s’acquièrent par les sens. » Ainsi à l’époque où cette traduction fut faite en Italie, on y connaissait la Métaphysique d’Aristote ; il y a plus, Aristote était déjà le sage phylosofo, le philosophe par excellence. En combinant cette donnée avec les recherches qui ont été faites sur l’âge et l’origine des traductions latines d’Aristote, et sur les commentaires grecs ou arabes employés par les docteurs scholastiques, M. Champollion aurait peut-être eu un élément de plus pour résoudre la question qu’il s’était posée.

M. Champollion nous pardonnera de lui avoir indiqué une tache bien légère dans son judicieux travail. Pas plus que les poètes, les érudits ne peuvent avoir le privilége de produire des ouvrages sans défaut.


Histoire de Normandie depuis les temps les plus reculés jusqu’à la conquête de l’Angleterre, par Th. Licquet. — Histoire de la Normandie depuis la conquête de l’Angleterre jusqu’à la réunion de la Normandie au royaume de France, par G.-B. Depping[1].

Le travail de M. Licquet embrasse l’histoire de la Normandie depuis la domination romaine jusqu’à la conquête de l’Angleterre ; belle et intéressante période, triste pourtant, car les Français y jouent un rôle inférieur vis-à-vis de leurs gigantesques adversaires. Charles iii, si justement nommé le simple ou le sot, est un rival peu digne de ce Rollon dont l’histoire sévère rejette, comme fabuleuse, une partie de la vie adoptée avec enthousiasme par la poésie. Il faut bien convenir toutefois que ces deux princes sont l’expression à peu près fidèle de leurs nations respectives, à l’époque où Dieu les a placés à leur tête.

M. Licquet s’est beaucoup occupé des détails de cette dramatique histoire. Ainsi, il consacre de longues pages au traité de Saint-Clair-sur-Epte, qui est fort important sans doute, puisque par lui une grande partie de la Neustrie fut cédée aux pirates du Nord ; mais il semble

  1. vol. in-8o, à Rouen, chez Frère, éditeur.