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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/615

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HISTOIRE LITTÉRAIRE.

Nous n’avons pas besoin de signaler le genre d’intérêt qui s’attache en ce moment au sujet de la première partie. L’attention publique est, depuis quelques mois, fixée sur les évènemens de la Péninsule. Nous nous contenterons de dire que les Espagnols ont été si satisfaits de cette portion de l’ouvrage de M. Viardot, qu’ils l’ont jugée digne d’être traduite et répandue, comme une espèce de catéchisme, à l’ouverture de leurs cortès actuelles. On y trouve, en effet, résumée en moins de cent pages, l’histoire des anciennes assemblées jusqu’à Charles-Quint, et celle des assemblées modernes. Ce morceau se termine par un appendice sur les provinces basques, et sur l’origine de cette opiniâtre insurrection qui, depuis une année et demie, lasse et défie tous les efforts de l’Espagne. M. Viardot montre que ce n’est point pour les principes de l’absolutisme, ni pour les droits du prétendant, que les provinces basques ont pris les armes, mais uniquement pour la conservation de leurs franchises, menacées par le retour à la centralisation et à l’uniformité.

La seconde partie de l’ouvrage de M. Viardot, celle qui est consacrée à l’histoire de la littérature, est assurément ce que nous possédons dans notre langue de plus étendu et de plus complet sur cette matière. Quelques aperçus profonds, mais un peu nébuleux, de Frédéric Schlegel, et les recherches fort insuffisantes et souvent fautives de M. de Sismondi, formaient jusqu’ici le fond de notre érudition sur la littérature espagnole. M. Viardot, tout en se condamnant encore à n’être que superficiel, a voulu nous donner un inventaire des richesses littéraires de l’Espagne. Il suit toutes les phases de l’esprit de cette noble nation, depuis les Romains jusqu’à nous. Après avoir montré quelle place distinguée l’Espagne conquise occupa dans l’empire romain, il passe à la formation des idiomes vulgaires. Nous trouvons, pour notre compte, qu’il a franchi trop vite toute la période barbare-ecclésiastique, depuis Isidore de Séville au vie siècle, jusqu’au poème du Cid, recueilli dans la seconde moitié du xiie. Cette période où domine la théologie, où l’Église et les conciles président à tout, serait d’autant plus curieuse à étudier en Espagne, que là combattaient ensemble, corps à corps, l’islamisme et le christianisme. C’est peut-être en étudiant cette période, et en voyant ce que l’Espagne a eu à faire pour rester chrétienne, qu’on aurait le mot de sa destinée dans les siècles suivans. Entamée d’abord par l’arianisme, puis par le nestorianisme, envahie au viiie siècle par le mahométisme, qui n’est au fond qu’une reproduction de l’arianisme, comment a-t-elle pu résister à tant de séductions et d’attaques ? Au ixe siècle, nous la voyons un moment incliner, avec Félix d’Urgel, vers