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REVUE. — CHRONIQUE.

spécial, restera toujours incomplet et mesquin. Les six archivoltes, en effet, doivent être peintes à fresques, et les autels doivent être ornés de marbres de couleur ; mais sans dorure, la peinture est toujours froide, et les marbres de couleur ont besoin d’un riche accompagnement. Il faudrait donc que les coupoles fussent dorées, ce qui coûterait 330,000 francs. »

M. Jaubert répond (en 1836) : « Nous sommes fondés à rappeler que la peinture, la dorure, et les incrustations étaient formellement exclues des prévisions de la chambre de 1833, et que dès-lors on ne devait pas engager la chambre dans cette dépense, sans avoir une autorisation. » — La commission de 1835 pensait cependant qu’il faudrait dorer les coupoles, et elle disait même le prix de cette décoration, et ainsi des fresques et des marbres.

En parlant du Muséum, M. Duvergier disait : « Quelle que soit la décision de la chambre, les fonds votés en 1833 n’auront pas été employés plus utilement, et dans aucun pays la science n’aura obtenu de la générosité nationale un si bel établissement. » Et partout les encouragemens et les éloges ressortent de l’examen du rapporteur de l’année dernière, et répondent aux critiques du rapporteur de cette année.

Il faut cependant le reconnaître, il y a plus d’art dans le rapport de M. Jaubert que dans le rapport de M. Duvergier de Hauranne ; nous parlons de l’art qui consiste à masquer l’aigreur et la passion sous la forme des vues d’économie et d’ordre, et sous l’amour de la régularité dans les affaires. Qu’on nous passe cette réflexion, qui se trouve amenée naturellement par l’assentiment donné l’an passé à tout ce que blâment M. Jaubert et ses amis dans cette session.

Une des considérations les plus plausibles du rapport de M. Jaubert est celle-ci : « La prérogative la plus importante de la chambre, le vote de l’impôt, deviendrait illusoire, s’il suffisait, pour qu’une dépense s’effectuât, qu’elle fût regardée comme avantageuse par les ministres. Sans doute les arts et les sciences ont droit à la faveur de la chambre, mais les routes et les canaux, les arsenaux et les fortifications, ne sont pas moins dignes de notre intérêt. Ce qu’on a fait pour les arts et les sciences, on pourrait le faire aussi pour les routes et les canaux ; dès-lors le budget n’existerait plus que de nom. » Mais, en vérité, l’objection n’est pas sérieuse. La construction d’un édifice peut être calculée d’avance, tant bien que mal, mais sa décoration est l’ouvrage des siècles. Eh quoi ! M. Ingres ou quelque autre grand artiste demanderait une somme exorbitante pour animer la coupole de notre plus beau monument, et l’on repousserait M. Ingres, ou l’on adjugerait la décoration de la coupole au rabais ! Il se peut que ce soit là le sentiment de M. Jaubert, mais assurément ce n’est pas celui de M. Duvergier de Hauranne, ni celui de MM. Piscatory, Aug. Giraud, Bussières et Jacques Lefebvre, qui ont travaillé au rapport de 1835.

Il ne manque pas d’exemples qui prouvent qu’on ne fait pas un tableau ou un bas-relief à point, comme on élève une forteresse ou comme on creuse un canal, et démontrent qu’en fait d’arts, un ministre ne peut pas toujours se renfermer religieusement dans son budget. Nous ne parlerons pas de l’exemple de Napoléon qui fit dresser les devis de l’arc de l’Étoile, des