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LE PORTUGAL AU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE.

fut seulement de croire que le renversement de la charte brésilienne pourrait se faire par des voies régulières et des modifications successives, sans attenter à la souveraineté de dona Maria II, reconnue par toute l’Europe. Ces dispositions étaient celles qu’aspirait à faire naître dans l’ame de l’infant M. le prince de Metternich, aux yeux duquel les droits de la jeune reine empruntaient un caractère inviolable de sa qualité de fille de l’archiduchesse Léopoldine.

En général, les cabinets se montraient, comme on peut le supposer, de fort bonne composition sur le sort d’une charte dont le voisinage était, pour la cour de Madrid, un sujet d’appréhensions continuelles, et par suite un embarras sérieux pour la France. Mais ils n’entendaient pas céder sur des droits consacrés par des conventions diplomatiques, et que don Miguel n’avait fait nulle difficulté de sanctionner en toute occasion, désavouant spontanément tout ce qui s’était tramé en son nom. Le ministre autrichien conseilla donc au jeune prince, qu’une décision de son frère venait de mettre en possession de la régence avec le titre de lieutenant-général du royaume, de se montrer, avant tout, sujet soumis, sauf à laisser la charte sécher sur pied, comme les arbres exotiques, qui meurent faute de culture. À Londres, le duc de Wellington, qui venait d’arriver au ministère, ne dut guère donner des conseils différens. La tombe s’était refermée sur M. Canning, et le concours énergique que l’Angleterre avait un instant prêté au parti constitutionnel en Portugal ne devait pas être continué par son successeur. Avant le départ de l’infant pour Lisbonne, le ministère britannique avait arrêté le rappel des troupes anglaises, seul point d’appui de la charte, seule protection des hommes compromis pour elle.

Beaucoup d’indices font supposer que l’infant quitta Londres à peu près résolu à suivre la marche prudente qui lui avait été tracée à Vienne. Il n’entrait pas alors dans sa pensée de violer le serment qu’il allait ratifier sous des formes si solennelles à celui qu’il avait librement reconnu pour son souverain, à la jeune enfant qu’il avait acceptée pour épouse. Mais comment cette tête ardente et faible eût-elle résisté à ce délire de joie populaire qui l’accueillit à son débarquement[1], à l’entraînement de ces vœux qui déjà perçaient de toutes parts, aux cris de vive le roi don Miguel Ier ! comment se défendre, lui, homme de dissimulation et de rancune silencieuse, qui avait tant de désirs à satisfaire et de vengeances à exercer, de l’irrésistible as-

  1. 22 février 1828.