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LA VALACHIE ET LA MOLDAVIE.

épaulettes d’une éloquence admirable et qui font marcher rondement les choses. En vertu de cette constitution, une assemblée régulière, composée de propriétaires revêtus de titres nobiliaires du premier et du deuxième ordre, doit se réunir tous les ans, faire des lois et voter le budget, dont elle ne supporte aucune charge ; les nobles sont dispensés du paiement de l’impôt. Les pouvoirs exécutif et judiciaire, auparavant confondus, sont devenus distincts. Six ministres à département forment le conseil administratif. L’expédition des affaires s’opère régulièrement ; l’organisation des tribunaux et des cours d’appel est achevée. On a créé, malgré l’esprit de centralisation dont la nouvelle administration est empreinte, des municipalités dans toutes les villes : pouvoir inconnu jusqu’alors. Les douanes intérieures et une foule d’impôts vexatoires ont été abolis et se trouvent remplacés par une légère taxe, dite de capitation ; titre faux : tout individuelle qu’elle soit, elle frappe l’agriculteur, qui, en Valachie, possède toujours un certain capital. Des établissemens de bienfaisance se sont élevés ; l’instruction laïque et religieuse a été fécondée, le régime des prisons considérablement amélioré ; l’embellissement des villes, l’entretien des routes publiques, la création d’une foule de services utiles et nouveaux, l’institution des procureurs auprès de chaque cour et tribunal, la suppression de la torture, sont des améliorations assez notables introduites par la nouvelle constitution, mot qui, par une modestie calculée, se trouve remplacé par celui de réglement organique.

Telles sont les principales phases de cette existence de peuple, les principales transitions par où il a passé pour arriver à l’état où il se trouve en ce moment, et qui ne devient compréhensible que si l’on parcourt la longue chaîne du passé. Il est évident que la Valachie n’a jamais été complètement conquise et soumise ; que son ancienne bravoure ne lui a jamais fait faute dans les longues et cruelles luttes qu’elle eut à soutenir ; qu’elle s’est long-temps défendue avec persévérance ; que la domination incontestable des Turcs ne remonte guère plus haut que l’avénement des Fanariotes, c’est-à-dire au-delà d’un siècle ; qu’enfin cette domination, toute humiliante, toute désastreuse qu’elle fût, n’a jamais enlevé à ce peuple sa nationalité. Aucun Turc ne s’est fixé dans le pays ; aucune mosquée n’y fut élevée ; la langue