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Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 15.djvu/143

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REVUE. — CHRONIQUE.

quelques hommes de talent et de cœur, qui reconnaîtront bientôt leur erreur, n’affaibliront pas le parti de l’ordre en France. Le pouvoir sera d’autant plus soutenu par le pays qu’il sera plus violemment attaqué, tant est grand en France l’instinct de stabilité et de conservation qui y domine. Le ministère qui a soutenu une si terrible lutte dans la session, a encore une belle tâche à remplir. Il y a un an, il arrêtait l’anarchie, prête à se répandre ; qu’il recommence ses efforts de l’année dernière, et qu’il se présente, à la session prochaine, comme il se présenta à la dernière session, en montrant les partis rentrés dans l’ordre et les esprits pacifiés. La chambre comprendra alors que ce n’est pas un ministère faible que celui qui résiste à des chocs aussi violens, et qui réprime sans réaction, non pas les partis, car nous ne voyons rien qui ressemble à un parti dans ce ramas d’opinions en colère, mais, comme le disait très bien le Journal des Débats, tous les restes des partis mécontens.

La joie de l’opposition, qui s’est jetée sur l’affaire de Belgique comme sur une proie, sera sans doute trompée. La Gazette d’Augsbourg a beau annoncer une campagne des troupes de la confédération, dans une correspondance venue peut-être de Paris, il paraît certain que l’Angleterre admet qu’une partie du traité des 24 articles peut être encore sujette à discussion. La France, ou plutôt la Belgique, n’est donc pas abandonnée, comme on l’a dit, par l’Angleterre, et tant que la France et l’Angleterre s’entendront pour la paix du monde, cette paix ne sera pas troublée.

Toutes les lettres de Londres ne sont pas uniquement remplies des détails du couronnement. Les nôtres nous parlent des chances qui s’ouvrent pour les tories en Angleterre. Le ministère whig qui a l’appui de la reine dans la personne de lord Melbourne, se maintiendra sans doute encore ; mais on peut prévoir les effets de la réaction qui commence en faveur d’idées plus stationnaires, en dépit de la répugnance de la jeune reine pour les tories. Les radicaux eux-mêmes désirent le retour des tories. Ils espèrent puiser quelque force dans les mécontentemens qu’ils supposent devoir naître d’un ministère tory ; mais ces espérances pourraient ne pas se réaliser de long-temps, car les state and church ont retrouvé une force qu’ils n’avaient jamais perdue qu’en apparence en Angleterre. Pour la France, le ministère de sir Robert Peel aurait aussi peu de conséquences fâcheuses que le ministère du duc de Wellington, qui reconnut en 1830 le gouvernement de juillet. Le ministère tory subirait les nécessités de l’Angleterre, et l’alliance de la France est une de ces nécessités, comme l’alliance de l’Angleterre en est une pour la France. Le parti tory, en rentrant aux affaires, ne retrouverait pas ce terrain tel qu’il l’a laissé, et là aussi s’élèveront de plus en plus de puissantes nécessités, auxquelles le gouvernement whig ou tory devra obéir. Ainsi, la réforme qui décline évidemment au point de vue politique, gagne du terrain, en Angleterre, du côté de l’administration. À cet égard, il s’opère des changemens considérables, mais dont la portée échappe presque toujours au parti tory, qui les adopte pour n’avoir pas l’air de repousser des améliorations inoffensives. C’est ainsi que la nouvelle législation sur les pauvres, par exemple, a fondé et tend