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REVUE. — CHRONIQUE.

chandises importées en Suisse par la France. À Lyon, tous les intérêts gagneraient à un blocus de la Suisse qui ne pourrait plus faire concurrence pour les exportations d’Amérique. Les déclamations des journaux de l’opposition ne sont rien que des déclamations, et, en France, on sait bien à quoi s’en tenir sur leur valeur. Nous serions fâchés que la Suisse l’apprit à ses dépens.

Une affaire grave s’est élevée entre le conseil général de la Loire-Inférieure et le préfet de ce département. D’anciens dissentimens entre le conseil et le premier fonctionnaire paraissent avoir éclaté avec plus de force que jamais, et ont amené une lettre du conseil général au ministre de l’intérieur, par laquelle on offre l’alternative de la démission du conseil ou de la retraite du préfet. Cette lettre, consignée sur le registre des délibérations, ne parviendra à l’administration centrale qu’à la fin de la session des conseils-généraux ; elle est donc encore comme non avenue, et on ignore ce que décidera le ministère. On peut toutefois prévoir qu’il ne reconnaîtra pas au conseil général le droit d’obliger le gouvernement à changer un préfet. Déjà un journal de l’opposition, le Constitutionnel, blâme sans réserve la conduite du conseil général. Nous aurions peine à employer des termes aussi rigoureux que ceux du Constitutionnel, à l’égard d’une assemblée où l’on compte des hommes aussi graves que le sont M. Delahaye-Jousselin, M. Bignon, M. Cossin, députés, et MM. les présidens Levaillant et Guillet. Nous n’avons pas besoin, nous, de témoigner notre adhésion au gouvernement par ces excès de rigueur pour ses adversaires, et nous attendrons le cahier du conseil général de la Loire-Inférieure pour juger ses actes. Mais en principe, sa lettre, qui est une sorte d’ultimatum, nous semble excéder ses pouvoirs, et le ministère aura, en cette circonstance, à bien marquer les limites qui séparent un conseil général d’une chambre des députés. C’est à son retour de sa belle résidence de Lagrange, où il va se reposer des fatigues d’une session difficile, que M. de Montalivet s’occupera de cette affaire. M. le comte Molé prend l’interim du ministère de l’intérieur ; on peut être assuré qu’en ses mains les affaires ne péricliteront pas.

Puisque nous parlons du Constitutionnel, nous devons le féliciter de la nouvelle route qu’il prend aujourd’hui. Le Constitutionnel s’était montré très irrité de la publication de la statistique des journaux que nous avons faite. Il y voyait une immoralité, une violation des secrets de l’industrie, comme si un journal qui demande au pouvoir de la déférence au nom du grand nombre de ses abonnés, et à qui l’industrie s’adresse pour annoncer ses produits, en raison même de ce nombre de lecteurs, pouvait et devait être assimilé à un négoce occulte. Le Constitutionnel contestait encore l’exactitude de nos chiffres. S’ils sont inexacts à son égard, c’est sans doute parce qu’on a compté, au timbre et à la poste, comme abonnemens du Constitutionnel, les feuilles qu’il échange avec les journaux de province et celles qu’il adresse gratis, en France et à l’étranger, à ses correspondans. Il s’ensuit qu’on serait