barbares que les barbares dont parlent les anciennes chroniques, continuèrent à ravager l’église. En 1564, les Suédois en firent une écurie. Auprès de l’autel du chœur, naguère encore étincelant d’or et de pierreries, ils ne trouvèrent que les armes de saint Olaf qu’ils emportèrent à Stockholm. Il restait encore à cette cathédrale si splendide autrefois et si vite dépouillée de ses richesses, il lui restait encore ce que ni les Danois, ni les Suédois n’auraient pu lui enlever, sa grande flèche qui s’élevait, disent les historiens, à deux cent vingt pieds. Un orage la renversa pendant l’hiver de 1689. Maintenant le toit est surmonté d’une tour carrée, massive, pareille à un clocher de village. La partie de la nef détruite par l’incendie n’a pas été rebâtie ; les statues des saints n’ont pas été replacées sur leur piédestal, et les dentelures légères, les rosaces brisées ou mutilées par le marteau, n’ont pas été refaites. Dans quelques endroits, la base des colonnes est seule restée ; dans d’autres, on a remplacé les piliers de marbre par des piliers de bois. Quand le roi de Suède vint, en 1818, se faire couronner dans cette cathédrale, il eut pitié du veuvage du chœur et y fit placer une copie du Christ de Thorvaldsen. On dit aussi qu’il a l’intention de mettre dans la nef les douze apôtres du célèbre sculpteur, tels qu’on les voit à Copenhague dans la cathédrale. Peut-être alors, pour leur faire place, sera-t-on obligé d’abattre une partie de ces loges à rideaux rouges qui recouvrent les deux côtés de la nef, et c’est une destruction dont je suis sûr qu’aucun homme de goût ne se plaindra. Malgré les ravages du feu et les ravages des hommes, cette cathédrale est encore l’un des monumens gothiques les plus curieux qui existent. Du milieu de la nef, il est triste d’observer les désastres qu’elle a subis ; mais, quand on pénètre dans l’enceinte du chœur, on y reste retenu par un sentiment d’admiration, et quand on la regarde du dehors avec son singulier mélange de construction, sa petite chapelle, posée sur un de ses flancs comme une châsse de saint, son clocher massif, sa coupole ronde comme celles des pagodes de l’Inde, et sa tour semblable à un minaret, il y a je ne sais quel vague souvenir des voyages d’Orient qui prête un charme de plus à cet édifice du Nord ; et si alors on remonte jusqu’à l’époque lointaine où ses murailles s’élevèrent sur la tombe d’un roi martyr de son zèle religieux, ce n’est plus seulement une œuvre d’art que l’on contemple, c’est une page d’histoire, c’est une légende de saint noircie par les siècles, altérée par des mains impies, mais assez belle encore pour arrêter long-temps le regard et la pensée.
À la chute du catholicisme, une nouvelle ère s’ouvre dans les annales de la cité de saint Olaf. Elle avait été ville de pélerinages, ville religieuse ; elle devint ville marchande. Ses cloîtres tombèrent en ruine, mais son port s’agrandit. En changeant de destinée, elle changea aussi de nom. Les sagas islandaises l’appelaient, dans leur langage poétique, Nidaros. Les contrats de négocians l’appelèrent Trondhiem (du nom du district où elle est située, Trondiagen) ; nous en avons fait, dans nos habitudes d’altération, Drontheim. Cette capitale des rois, cette métropole des évêques, transformée en entrepôt