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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 17.djvu/717

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ÉCONOMIE POLITIQUE.

D’après ce qui vient d’être dit, on se fera du moins une vague idée de la constitution de l’agriculture, de l’industrie et du commerce dans l’Occident à l’époque qui précéda le débordement des races germaines. Le peu qu’on sait en cette matière a été fourni par les laborieux investigateurs du droit romain. Combien ne doit-on pas regretter qu’un texte si intéressant n’ait pas trouvé dans l’historien de l’économie politique, un interprète plus patient et plus érudit ?

Des recherches sérieuses sur l’administration impériale eussent éclairé les jours nébuleux du moyen-âge ; car on sait que les pays dépendans de l’empire conservèrent, même après l’invasion, la plupart des usages qui résultaient de la législation romaine. Quelle est, en effet, la force qui pousse les peuples barbares vers les régions civilisées ? C’est une rapacité instinctive, un farouche besoin de jouissances. Si les conquérans respectèrent quelque chose, ce fut assurément le mécanisme financier imaginé par les empereurs. Soit par politique, soit par l’intercession du clergé, ils allégèrent un instant les charges qui accablaient le bas peuple ; Salvien le dit positivement. Mais ils se gardèrent bien de tarir toutes les sources du revenu en désorganisant les services publics, et particulièrement les corporations industrielles. Le goût du faste et de l’éclat extérieur, très prononcé chez les conquérans barbares, comme chez tous les parvenus, mit en grande vogue les étoffes précieuses et les marchandises importées d’Orient. De là un commerce qui ne fut pas sans importance sous les deux premières dynasties. Nous ne trouvons pas mention de ce fait dans le livre de M. Blanqui, mais, à la place, une insignifiante paraphrase des instructions données par Charlemagne aux régisseurs de ses domaines. L’appréciation des grands mouvemens historiques, comme les croisades, l’affranchissement des communes, la réforme, laisse également beaucoup à désirer. Elle reproduit, comme des résultats avoués par l’économie politique, les conclusions traditionnelles des résumés historiques. En un mot, l’évidente prétention de dessiner à larges traits, dans un cadre où la plus rigoureuse exactitude eût été nécessaire, a trop souvent égaré l’auteur. Pour trouver l’occasion de le louer, nous courons aux pages qui éclaircissent des points de doctrine économique, et que M. Blanqui a pu aborder avec l’autorité que lui donne une parfaite intelligence des principes. Nous avons cité déjà le chapitre qui explique les variations des valeurs monétaires ; ceux qui sont consacrés à la réorganisation des corps de métiers sous le règne de saint Louis, aux villes anséatiques, à la fondation et au mécanisme des banques, sont également dignes de remarque.

Arrivé à l’époque où l’on peut saisir pour la première fois un ensemble de vues administratives, un système économique tout d’une pièce, M. Blanqui change de méthode et commence, pour ainsi dire, un nouveau livre. À des aperçus qui embrassaient vaguement l’histoire générale, succède une chronologie des écoles qui ont fait date dans la science. On est ainsi conduit du régime patriarcal de Sully, le vénérable patron de l’agriculture, jusqu’aux utopies saint-simoniennes, en passant par le colbertisme qui fait con-