récit d’arabesques de toutes sortes, et crut avoir fait une épopée, — une épopée chrétienne. Elle parut, après dix ans de préparations et de remaniemens. Il postula aussitôt son bénéfice ecclésiastique ; on ne l’écouta pas, et il se fâcha gaiement, car c’était un homme d’excellente humeur, malgré ses ridicules :
« Un vers sacré semblerait inférer
Qu’au bien d’église on eût droit d’aspirer.
Mais, ô bon Dieu ! combien en voit-on d’autres,
Pourvus de mitre et d’amples patenôtres,
Vivre entre nous avec autorité,
Qui ne l’ont pas aussi bien mérité !
À tout le moins chacun dit, à ma mine,
Qu’un long habit de serge ou d’étamine
Ne siérait pas tant mal dessus mon corps.
...............
Ce que j’en dis n’est pas que je caymande.
J’ai trop de cœur. Je ne gueuzay jamais ! »
Il se recommande aux vieux seigneurs, à ses camarades, au duc d’Orléans. Il rappelle à ce dernier un service que le duc lui avait déjà rendu.
Lorsqu’un matin, en prenant sa chemise,
Il avait dit : « Expédiez le Gros ! (Saint-Amant.)
« Je l’aime bien, car il aime les brocs ! »
On n’expédia pas le Gros, dont le temps était fini. C’était en 1660. La société, lasse et battue des vents, faisait voile vers le havre magnifique que la volonté de Louis XIV allait lui ouvrir. Molière venait d’exterminer les précieuses. Tout se calmait, se rangeait et s’ordonnait sous la main impérieuse du maître. Que fera-t-on de cette relique d’un siècle qui s’en va, de Saint-Amant, type de l’anarchie littéraire, ami des seigneurs qui courent les aventures, chef de la société des goinfres, bouffon des princesses romanesques, capitan prétentieux, libertin et farouche, ivrogne et huguenot ? Il réunissait toutes les conditions imaginables pour mourir de faim dans son grenier, et il y mourut. Comme il n’avait pas (on le sait) le moindre bon sens, il crut relever ses affaires en flattant Louis XIV, et dans un poème intitulé la Lune parlante, il se mit en frais de panégyrique. Pauvre vieux Falstaff, qui s’adressait au jeune monarque, à ce roi des convenances, de l’élégance et de la dignité, comme il se fût adressé à Cadet-la-Perle, au coadjuteur de Corinthe, ou à son cher