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REVUE. — CHRONIQUE.

demandées comme des armes propres à combattre, dans la rue et dans la presse, ces hardies tentatives, ont été proposées par les hommes les plus distingués de la chambre, par des hommes que les partis ont mis avec orgueil à leur tête, et qui ne se repentent sans doute pas de ce qu’ils ont fait. Que penser maintenant des partis qui proposent l’abolition de ces lois ? Assurément, ils n’ont pas pour appui les hommes qui les ont faites ; leurs engagemens avec l’opposition, s’ils en ont eu, n’ont jamais été jusque-là. L’opposition avancée n’a même été dangereuse qu’un moment, quand, subissant l’influence des chefs parlementaires dont nous parlons, elle savait se modérer et ne pas proposer chaque jour le changement complet de l’état social. Maintenant que nous la voyons revenue à ses anciennes habitudes, nous devons en conclure qu’elle est séparée de tous les hommes modérés, opposans ou non, et qu’elle veut de nouveau marcher seule. Si ces symptômes ne nous trompent pas, on pourrait espérer de voir le parti modéré reprendre son unité, et s’appuyer encore sur les hommes qui ont fait sa force et sa gloire. Ce serait en réalité l’établissement tant désiré du gouvernement parlementaire, que le rapprochement des hommes d’une même opinion dans un seul camp. Nous ne parlons pas ici d’une modification ministérielle. Le rapprochement dont nous parlons aurait une portée bien plus haute ; il amènerait une modification dans la direction de la chambre et de l’esprit public, un retour aux véritables idées de gouvernement, et le classement dans le pouvoir, à leur place, des hommes qui ont le plus contribué, depuis 1830, à combattre l’anarchie et le désordre. Quelques journaux parlent d’une nouvelle coalition qui serait dirigée contre le ministère actuel ; la coalition qui se ferait ainsi aurait lieu au-dessus de toutes les combinaisons personnelles ; elle comprendrait tous les hommes influens qui sentent le besoin de sauver l’ordre social, et, sous ce point de vue, on doit penser que l’administration actuelle ferait en sorte de figurer dans ce cercle, et non en dehors. Voilà, du moins, ce qui nous semble ressortir de l’attitude que prend la gauche avancée depuis quelques jours, et nous ne voyons pas quelle autre interprétation on peut donner aux bruits que répand la presse. Nous n’avons pas d’autres indices d’une combinaison quelconque ; aussi ne sont-ce pas des nouvelles que nous prétendons donner, mais seulement des réflexions qui découlent naturellement de l’état des choses.

Tandis qu’une partie de la gauche avancée se sépare ainsi et peut-être malgré elle, par le seul effet de ses passions, des hommes modérés qu’elle soutenait depuis quelque temps, d’autres organes de ce parti paraissent se préparer à une scission plus volontaire entre eux et les chefs qu’ils s’étaient donnés. Les organes dont nous parlons attendent évidemment quelques circonstances pour prendre un parti. Nous ne nous joindrons pas à ceux qui pensent que ces circonstances sont toutes personnelles, et qui assurent qu’un chef dans l’opposition semble infiniment moins utile et moins profitable aux organes en question, que deux chefs dans le pouvoir, même s’ils étaient d’un moindre mérite. Ces misères d’intérieur de parti ne méritent pas qu’on s’y arrête. Nous abandonnons aux anciens organes de la coalition, aux puritains même dégé-