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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/459

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LE SCHAH-NAMEH.

que Rustem, son maître, lui a inspirés. Le roi des Touraniens, Afrasiab, a fait des propositions de paix, et, sur la demande de Siavesch, lui a envoyé cent otages. Kaous, avec son impétuosité ordinaire, condamne les négociations entreprises par son fils et demande les otages pour les pendre. Siavesch ne peut consentir à ce manque de foi, il aime mieux quitter son armée, et, sous un nom supposé, aller cacher sa destinée à la cour d’Afrasiab. Celui-ci l’accueille avec tendresse et lui donne en mariage une de ses filles, bien que les devins aient annoncé qu’un de ses petits-fils doit détruire le pays de Touran, et qu’il craigne, en unissant sa fille à un héros iranien, de hâter l’accomplissement de cette prédiction. Cependant Siavesch finit par exciter l’envie du frère d’Afrasiab, et le roi de Touran lui-même ordonne sa mort.

Mais bientôt naît ce fils annoncé comme le fléau des Touraniens C’est Khosrou, dans lequel on est porté à reconnaître Cyrus. Malcolm fait remarquer quelle est, à travers bien des différences, la coïncidence qui se trouve entre le récit d’Hérodote et celui de Firdousi. « Un petit-fils naît à un roi qui, craignant pour sa propre sûreté, cherche à se défaire de cet enfant et charge de ce soin son ministre. L’enfant est conservé par la personne qui avait ordre de le faire périr. Le monarque le sait et consent à le laisser vivre. Le jeune prince fait ensuite la guerre à son grand-père, dont l’armée se trouve être commandée par le même ministre[1]. » Certes, ces analogies, sans parler de celle du nom, sont frappantes. On peut remarquer, en outre, l’extrême ressemblance de toute cette histoire avec celle de Romulus, qui disparaît aussi du milieu des siens, comme nous le verrons tout à l’heure de Khosrou. C’est une raison de plus de ne voir qu’une légende dans ce que racontent les premiers chapitres de Tite-Live. Les innombrables batailles de Khosrou contre Afrasiab paraissent être un vague souvenir des expéditions de Cyrus contre les Scythes. Xénophon dit positivement[2], en deux endroits, que, de son temps, des chants célébraient les aventures et les exploits de Cyrus. Dans ces chants populaires se conservait probablement la tradition qui a fourni la base de cette partie du Livre des Rois.

Ici ces guerres qui, dans la réalité, furent causées par des inimitiés nationales et par les causes politiques et géographiques qui, à toutes les époques, ont mis aux prises les habitans de la Perse et leurs

  1. Histoire de la Perse, par Malcolm, traduction française, pag. 334.
  2. Préface de Gœrres, pag. 153.