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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/498

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REVUE DES DEUX MONDES.

Un oiseau chante au bois ; que chante-t-il ? malheur !
La superstition nous entoure sans cesse,
Elle nous avertit et nous parle en secret,
Et l’homme épouvanté se tient dans sa tristesse…
La porte sur ses gonds roule et nul n’apparaît.

(Avec terreur.)

Holà, quelqu’un vient-il ?

le souci.

Holà, quelqu’un vient-il ?Vraiment oui, la réponse
Est dans la question.

faust.

Est dans la question.Et quel es-tu ?

le souci.

Est dans la question.Et quel es-tu?Pardieu,
Je suis ici.

faust.

Je suis ici.Va-t’en.

le souci.

Je suis ici.Va-t’en.Ma place est en ce lieu.

faust.

Alors observe-toi, prends garde et ne prononce
Aucun mot de magie.

le souci.

Quand l’oreille n’entend pas
Ma voix, je chante tout bas
Au fond de la conscience,
Et je change d’apparence
Pour exercer ma puissance.
À toute heure sur vos pas,
Sombre et pâle satellite,
Je viens sans que l’on m’invite,
Et l’homme, le même jour,
Me maudit, me fait la cour.

Aucun mot de magie.Eh ! ne connais-tu pas
Le Souci ?

faust.

Le Souci ?J’ai couru le monde, à chaque pas
Saisissant aux cheveux ma belle fantaisie ;
Ce qui n’a pu suffire aux besoins de ma vie,
Le repoussant toujours ; laissant s’évanouir
Aussi ce qu’en mes mains je ne pouvais tenir.
L’action, le désir, puis l’action encore,
Voilà ma vie, hélas ! jadis à son aurore,