Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 20.djvu/429

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
425
REVUE LITTÉRAIRE.

fables transparentes, il s’agit toujours du rossignol et de la rose, du papillon et du flambeau, du taon et du lotus.

L’ouvrage de M. Garcin de Tassy est encore incomplet, et la partie inédite doit offrir, selon nous, beaucoup plus d’importance que le volume aujourd’hui publié. Jusqu’ici, en effet, ce ne sont guère que des énumérations biographiques, que des notices, utiles sans doute, mais la plupart sans grand intérêt. L’auteur, il est vrai, a traduit çà et là quelques morceaux pleins de poésie, ou remarquables au point de vue de la philosophie ; mais l’ordre alphabétique nous paraît avoir été adopté à tort, et il eût été plus convenable, à notre sens, de ne pas s’abandonner ainsi au hasard inintelligent de l’alphabet, qui mêle incessamment et sans aucun ordre, sans qu’on puisse surtout suivre la génération des idées et des écoles, tous les hommes et tous les temps. Cela rend la lecture fatigante, et rompt à chaque instant l’attention. Si l’on objectait cependant que par là les recherches sont rendues plus faciles, on pourrait répondre qu’une table bien faite eût tout sauvé. L’anthologie que M. Garcin de Tassy nous promet pour son second volume, ces morceaux étendus et ces analyses, qui seront fort curieux sans nul doute, n’eussent-ils pas été bien mieux placés dans la biographie même des écrivains, et n’en eussent-ils pas corrigé à propos l’uniformité monotone ? Quoi qu’il en soit, cette estimable publication mérite les encouragemens de la critique et l’appui du monde savant.


Notices sur La Romiguière, Van-Praët, Vanderbourg, Parent-Réal, Tacite, etc.[1], par M. Daunou. — Nous avons, contre nos habitudes, négligé de parler de la dernière séance annuelle de l’Académie des inscriptions, et cet oubli n’était guère pardonnable, car il ne s’agissait pas moins que de deux lectures de M. Daunou : la première, sur Vanderbourg, l’éditeur, et pour quelques-uns l’auteur présumé des poésies de Clotilde de Surville, la seconde sur Van-Praët, le célèbre bibliothécaire. Heureusement ces Notices viennent d’être imprimées, et le nouveau public auquel s’adresse aujourd’hui M. Daunou aura pour ces solides et délicats morceaux des applaudissemens, peut-être moins bruyans, mais aussi sincères et plus durables que ceux des auditeurs de l’Institut. Rien de plus élevé et de plus simple à la fois que la biographie de Van-Praët ; c’est un modèle d’atticisme et de bon goût. Il y perce à toutes les pages comme un amour sincère des vertus du savant, comme une sympathie éclairée et sereine pour ceux qui évitent l’éclat et préfèrent modestement l’ombre. De plus une ironie, pleine d’aménités malignes contre les mauvaises passions du métier, anime à propos et aiguise ce calme récit. « Comment un si modeste genre d’études n’est-il point exempt de ces rivalités malfaisantes, dit excellemment M. Daunou à propos des pamphlets oubliés de l’abbé Rive contre Van-Praët ? On s’afflige plus qu’on ne s’étonne des querelles passionnées que de grands intérêts ou de hautes prétentions suscitent au sein de la république des lettres ; mais que l’époque ou d’autres circonstances d’une édi-

  1. Chez Firmin Didot, rue Jacob, 56.