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LES SCIENCES EN FRANCE.

à craindre que les travaux de nos savans soient ignorés au dehors ; mais cette prééminence du français peut nous porter quelquefois à la nonchalance lorsqu’il s’agit d’apprendre les autres langues et nous faire même taxer d’indifférence par les étrangers, qui ne se rendent pas bien compte des motifs par lesquels des ouvrages capitaux, écrits en allemand, tels, par exemple, que le recueil de MM. Gauss et Weber sur le magnétisme, ou les recherches de M. Stern sur la géométrie transcendante, sont si peu répandus et si peu cités chez nous.

Au reste, il ne faudrait pas seulement que les membres de l’Institut eussent toutes les facilités désirables pour savoir promptement ce qui se fait hors de France, mais on devrait aussi s’empresser de leur fournir tous les moyens de travailler activement au progrès des sciences, de faire toutes les recherches auxquelles ils pourraient vouloir se livrer. Personne ne croira, hors de Paris, qu’il n’y ait à l’Institut ni un cabinet de physique, ni un laboratoire de chimie, destinés aux travaux et aux recherches des académiciens, et pourtant c’est l’exacte vérité. Sans doute, l’Académie des Sciences peut aller au secours des savans qui voudraient faire construire de nouveaux appareils dont l’utilité serait reconnue ; mais ses ressources sont bornées, et les appareils construits ainsi dans des cas exceptionnels ne peuvent ordinairement être employés à d’autres travaux, tandis que, s’il y avait une série complète de machines et d’instrumens toujours à la disposition des savans, il est hors de doute que ces moyens faciliteraient les recherches, qu’ils les feraient même naître, et qu’ils serviraient à exécuter des expériences et des tentatives qui actuellement restent toujours à l’état de projets, faute de moyens faciles et prompts pour les réaliser. Il y a plus d’un siècle qu’un particulier, le comte Marsili, créa, avec ses propres ressources, un Institut des sciences à Bologne. Cette société, fondée dans une ville secondaire, ne peut, sous aucun rapport, être comparée à l’Institut de France, et cependant elle a rendu de notables services aux sciences, parce que le fondateur avait compris que la première condition pour que son institut prospérât, était de fournir aux savans qui le composaient les moyens de faire des recherches nouvelles. Aussi, ne manqua-t-il pas de mettre à la disposition des académiciens, dans un même local, un cabinet de physique, un observatoire, des collections d’histoire naturelle, enfin tous les moyens de recherches qu’on pouvait réunir alors. Cette idée-là se trouve dans la loi qui a servi à organiser l’Institut de France, mais il ne paraît pas qu’elle ait été jamais réalisée. À la vérité, l’Aca-