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L’HINDOUSTAN. — AFFAIRES DE CHINE.

l’influence de son gouvernement et de faire avorter toute tentative extérieure contre le maintien de cette influence. Plusieurs démonstrations importantes, plusieurs expéditions décisives devaient avoir lieu dans ce but, et la chaîne de ces entreprises hardies, après avoir fixé son premier anneau sur le plateau de l’Afghanistan, traverse en ce moment les mers pour aller trouver en Chine un nouveau point d’appui. Les opinions de quelques publicistes ont été partagées sur la question de savoir si la puissance anglaise doit perdre ou gagner, en dernier résultat, à l’expédition d’Afghanistan, et l’on a été jusqu’à soutenir que c’était une grande imprudence ou même une faute immense à lord Auckland que d’avoir passé l’Indus, et d’avoir ainsi attiré l’attention et les forces de la Russie de ce côté ! (Comme si l’attention de la Russie avait cessé, depuis Pierre-le-Grand, d’être dirigée vers la Perse et l’Asie centrale !) Selon nous, la véritable question, au moins la question préalable, est de savoir si l’Angleterre pouvait éviter de passer l’Indus, et nous ne craignons pas d’affirmer qu’elle se trouvait, depuis plusieurs années, dans la nécessité fatale de franchir cette barrière, non pour la détruire, mais pour en fortifier les approches et la rendre inexpugnable, autant au moins qu’il était au pouvoir de la politique et de la stratégie de le faire. Nous pensons que l’Angleterre a voulu sincèrement, cette fois, le rétablissement de Shâh-Shoudjah sur le trône de ses pères, et qu’il était d’une bonne et saine politique de songer à reconstruire avec les débris épars de la monarchie douranie un état qui pût couvrir l’Inde anglaise et qui eût intérêt à défendre cet empire contre les tentatives envahissantes de l’Occident. Nous croyons même, et nous l’avons déjà dit, qu’il eût été sage de faire, il y a six ans, ce qu’on a fait l’année dernière, et que lord W. Bentinck aurait pu recueillir, à moins de frais, pour la nation et pour lui-même, la moisson de gloire que son successeur a été conquérir dans l’Afghanistan.

Cette expédition que le ministère anglais, dans la séance du parlement du 6 février dernier, a qualifiée à juste titre de miracle moral, cette expédition qui a employé 22,000 hommes, un matériel immense, 27,000 chameaux, qui a parcouru une distance de 1,350 milles jusqu’à Caboul, se liait à un vaste système d’opérations dont l’accomplissement a exigé un surcroît de 40,000 hommes de toutes armes dans les forces anglo-indiennes. Ces précautions étaient nécessaires, et le ministère l’a déclaré dans cette même séance ; on avait su de la manière la plus positive que quelques-uns des chefs mahrattes, le