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ÉCOLE DES BEAUX-ARTS.

Qu’il ne faut pas avoir de musées ? M. Quatremère ne l’ose pas dire lui-même. Il prétend seulement qu’il vaudrait mieux donner une destination sociale aux travaux des artistes, ce dont il faut certainement tomber d’accord, et ne pas trop compter sur les musées pour la prospérité de l’art, ce qui n’est pas moins évident. Le plaidoyer de cet ingénieux et souvent profond critique n’est donc qu’une espèce d’oraison funèbre du grand art. Mais nous ne pouvons pas sortir de notre temps. Il nous faut donc accepter l’art tel que nous l’a fait le cours des sociétés et de la civilisation modernes, et celui-ci ne peut aller sans musées, puisque c’est tout ce qui lui reste. Ceci est une question, comme on voit, toute pratique, et, dans les choses de pratique, il faut se tenir toujours aussi près que possible du fait.

Si donc il faut avoir des collections d’objets d’art, les plus complètes et les mieux choisies seront nécessairement les meilleures ; et, si le Musée des Études à l’École royale des Beaux-Arts peut atteindre ce but relatif, c’est tout ce qu’on a droit d’exiger.

Enfin on a nié la possibilité d’exécuter le programme indiqué, et il est nécessaire de répondre en deux mots à cette objection directe. On a déclaré chimérique et extravagante l’idée de réunir dans l’enceinte d’un édifice, quelque grand qu’il soit, toute la sculpture ancienne et moderne. Présenté sous cette forme, le problème est non-seulement insoluble, mais ridicule. Heureusement il ne s’agit nullement de cela. Il n’est pas question de former une glyptothèque universelle, mais une glyptothèque choisie. Cette distinction et cette restriction bien comprises répondent à tout.

D’ailleurs, il y a une dernière réponse meilleure encore, c’est le fait ; car s’il nous a plu de considérer jusqu’ici la formation de ce musée comme un simple projet, nous pouvons maintenant assurer que déjà la tâche est plus qu’à moitié remplie. Il nous suffirait de consulter le catalogue, pour convaincre à cet égard les plus incrédules ; mais nous préférons renvoyer nos lecteurs à l’an prochain, à pareille époque. Ils pourront alors parcourir avec nous les salles et galeries qu’ils ont trouvées fermées, et voir de leurs yeux et toucher de leurs mains cette histoire figurée de l’art, que M. Delaroche aura aussi alors achevé de peindre symboliquement sur le mur de l’amphithéâtre central du palais de l’école.


Louis Peisse.