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« Tenez pour certain que telle est la confiance de lord Palmerston, et celle qu’il a fait partager à ses collègues. »

Il y avait là deux prédictions : l’une, qu’au jour du danger, la France abandonnerait sa politique et laisserait faire ; l’autre, qu’après avoir laissé faire, elle s’en consolerait vite et rentrerait avec empressement dans ce qu’on appelle le concert européen. On sait que la première est accomplie depuis dix mois. La seconde vient de s’accomplir à Londres le 13 juillet dernier, entre un discours injurieux pour la France par le ministère qui s’en va, et un discours hostile à la révolution par le ministère qui arrive. C’est pour lord Palmerston un dernier triomphe, et pour sir Robert Peel une première satisfaction.

Cet évènement est grave, bien qu’il ait fait peu de bruit, grave en ce qui concerne l’avenir de l’Orient, plus grave en ce qui touche à la situation de la France au milieu des nations européennes. C’est sous ce dernier point de vue uniquement que je me propose de l’examiner. À travers les récits contradictoires qui viennent chaque jour de l’Orient, une seule chose paraît certaine, c’est que le funeste traité du 15 juillet n’a fait qu’aggraver le mal au lieu de le guérir, et que, grace à ce traité, toutes les parties du vaste empire qu’on prétendait consolider craquent à la fois et menacent ruine. Mais si, dans l’avenir de l’Orient, tout est encore mystérieux et voilé, tout au contraire, dans la situation de la France, est simple, clair, évident. C’est là ce qu’il importe de montrer, non dans un vain esprit d’opposition ou de récrimination, mais pour que les dépositaires officiels de notre honneur et de notre puissance ne s’endorment pas dans une fatale quiétude. Tout le monde, au reste, a le sentiment que la France, aujourd’hui, doit surtout songer au dehors, et ce n’est point par hasard ou par caprice que des hommes comme M. Thiers et M. Guizot aspirent à diriger les affaires de l’extérieur plutôt que de l’intérieur. Il est donc bon que la pensée publique se tourne aussi de ce côté, et que de mesquines querelles s’effacent enfin devant de si grands intérêts.

Il serait inutile de revenir longuement sur le passé. Parmi les hommes éclairés et consciencieux, il y a deux avis sur le degré de résistance qu’il convenait d’opposer au traité du 15 juillet ; il n’y en a qu’un sur la nature, sur le but, sur la portée de ce traité. De temps en temps, à la vérité, il se rencontre un orateur ou un écrivain qui, dans un fol esprit d’inimitié contre un ministère tombé, s’efforce de persuader au public que les torts sont du côté de la France, et que