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le vassal de l’Angleterre. De tous les états sur lesquels nous avions action, il n’en reste qu’un, la Belgique, qui ne nous ait pas tout-à-fait échappé ; encore n’est-il pas bien sûr qu’en refusant le seul moyen de consolider l’alliance entre les deux pays, le ministère ne l’ait pas tout récemment anéantie, autant qu’il était en lui.

En 1815 sa puissance territoriale, en 1831 sa puissance révolutionnaire, de 1836 à 1841 sa puissance d’influence, la France a donc laissé successivement tout décliner entre ses mains. Et cependant telle est la vieille opinion qu’on a d’elle dans le monde et telles sont ses immenses ressources, qu’il y a six semaines, il lui restait encore une force véritable, son mécontentement. « La France, pouvait-on se dire à l’étranger, subit sa situation ; mais elle la connaît et la juge. La preuve, c’est que le gouvernement, bien qu’ami de la paix, arme le pays jusqu’aux dents, et garde une attitude isolée. En 1840, la France a été prise au dépourvu, et elle a compté outre mesure sur la résistance du pacha. De là seulement la patience qu’elle a montrée, les échecs qu’elle a subis. Quand, par ses représentans légaux, elle a été appelée à prendre un parti, tout d’ailleurs était à peu près accompli, et il fallait se résigner ou jeter le gant après coup. Dans cette alternative, la France s’est résignée, mais avec tristesse, avec colère, et un vif ressentiment au fond du cœur. Tout annonce qu’elle n’entend pas pousser plus loin les concessions, et que, même seule contre tous, elle est déterminée à reprendre son rang, à reconquérir son influence. » Voilà la dernière force qui restait à la France, ou, comme on l’a dit à la tribune, la dernière valeur qu’elle eût entre les mains. Eh bien ! je le dis avec douleur, cette dernière force, la convention du 13 juillet nous l’enlève ; cette dernière valeur, elle nous en dépouille sans compensation. Aujourd’hui l’Europe est autorisée à croire que l’isolement n’était pas sérieux, et que les armemens n’avaient d’autre but que d’endormir et de calmer les agitations de l’opinion publique. L’Europe est autorisée à croire que la France s’apaise aussi vite qu’elle se fâche, s’adoucit aussi facilement qu’elle s’irrite. L’Europe est autorisée à croire qu’à condition d’agir avec énergie et rapidité, on peut tout tenter contre ses intérêts, et qu’après une bouderie passagère elle accepte d’abord, puis consacre par sa signature les faits accomplis. Ainsi se trouve fortifiée cette idée déplorable, que la France n’a une diplomatie que pour faire des notes, une armée que pour se battre en Afrique et maintenir l’ordre à l’intérieur. Comment veut-on, après cela, que dans les conseils