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Sous le rapport qui nous occupe, la chimie est bien moins avancée que la physique. Les élémens matériels et pondérables qui forment son domaine ont résisté jusqu’à ce jour. Au milieu des épreuves les plus violentes et les plus multipliées, dans le creuset le plus incandescent comme dans le courant désorganisateur de la pile voltaïque, chacun d’eux semble avoir conservé l’ensemble de ses propriétés physiques et chimiques. Cependant, à l’époque même où l’emploi de l’électricité nous découvrait les métaux alcalins et terreux, les recherches sur l’ammoniaque conduisaient à admettre un métal non élémentaire, c’est-à-dire un composé se comportant comme les corps simples. Les chimistes de nos jours ont conservé cette hypothèse, et rangé l’ammonium, radical composé de l’ammoniaque, à côté des radicaux simples de la soude et de la potasse. Entraînés par le mouvement de l’époque, les chimistes abandonnèrent bientôt cette voie, et la décomposition des élémens fut abandonnée aux recherches de ces alchimistes modernes, bien plus nombreux qu’on ne le suppose, qui poursuivent, dans leurs mystérieux laboratoires, l’accomplissement du grand œuvre, la transmutation des métaux. Mais des travaux récens du plus haut intérêt vont peut-être ramener l’attention sur des faits trop long-temps oubliés. Essayons d’en donner un aperçu à nos lecteurs.

Rappelons d’abord quelques-uns des principes fondamentaux qui ont le plus contribué à élever la chimie moderne au rang qu’elle occupe, qui ont permis de suppléer à ce que nos méthodes expérimentales ont nécessairement de borné en les aidant de toute la puissance du calcul. On sait que les bases ou oxides métalliques (métal plus oxigène) et les acides ont les uns pour les autres la plus grande affinité, et qu’en se combinant ils donnent naissance à des composés désignés sous le nom général de sels. Eh bien ! dans un sel déjà formé, un métal peut prendre directement la place d’un autre. Par exemple, si dans du nitrate d’argent (oxide d’argent plus acide nitrique) nous plaçons une lame de cuivre, celui-ci se dissoudra peu à peu, tandis que l’argent reparaîtra à l’état métallique. Bientôt tout le nitrate d’argent se trouvera transformé en nitrate de cuivre. Dans cette opération, ce dernier métal se combine donc à la fois avec l’oxigène de l’oxide d’argent et avec l’acide nitrique. Mais, tandis que le premier sel renfermait treize cent cinquante parties d’argent, le second n’en contient que trois cent quatre-vingt-seize de cuivre. Il faut donc bien moins de cuivre que d’argent pour former un sel avec la même quantité d’oxigène et d’acide nitrique. Tous les corps