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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 3.djvu/739

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MISÉ BRUN.

PREMIÈRE PARTIE.

I.

La veille de la Fête-Dieu, en l’année 1780, toutes les maisons de la ville d’Aix étaient, selon l’ancien usage, splendidement illuminées et décorées. Des pots à feu, bariolés de fleurs de lis et d’écussons aux armes de Provence, étaient alignés sur toutes les fenêtres, et projetaient une lumière rougeâtre et fumeuse qui, se combinant avec les douces clartés de la lune, effaçait toutes les ombres et répandait jusqu’au fond des plus étroites ruelles une sorte de crépuscule. Les bourgeois et les gens de boutique se tenaient au balcon ou sur la porte de leur logis, tandis qu’une multitude curieuse se promenait par les beaux quartiers où l’on allait représenter la première scène du drame original et pieux inventé par le roi René. La foule se pressait aux carrefours et s’alignait le long des rues pour voir passer la fantastique cavalcade, où figuraient tout ensemble les divinités de l’Olympe, les saints personnages de l’ancien Testament, et la caricature des ennemis politiques de René d’Anjou. Le cortége qui allait