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REVUE DES DEUX MONDES.

Un enfant de quatorze ans venant du comté de Stafford pour s’embarquer.

Une femme, renvoyée du logement qu’elle occupait à Leeds.

Une jeune fille, qui travaillait dans une fabrique de Manchester, allant à la recherche de sa sœur.

Une Irlandaise, qui était depuis deux mois et demi à Liverpool.

Une femme de Dublin, sans ressource, prétendant qu’on lui a volé 5 livres sterling sur le paquebot.

Un matelot américain de Savannah, depuis cinq semaines à Liverpool.

Mari et femme, venant de Nottingham, tisserands de leur état, allant à Dublin.

Une Irlandaise, avec trois enfans, à la recherche de son mari.

Deux enfans de quatorze ans, arrivant, l’un de Glasgow, l’autre de Newry, et que l’on a ramassés dans les rue.

Une femme de Liverpool, abandonnée par son mari.

Un matelot, sortant de l’hôpital.

Enfin, des soldats congédiés, des ouvriers de Macclesfield, de Birmingham, de Warrington ou de Londres, cherchant, les uns de l’ouvrage, les autres un navire qui les reçoive en qualité de matelots, et parmi ces derniers un jeune fileur de Manchester, qui arrivait, par une pluie battante, nu-pieds, couvert à peine d’un pantalon et d’une chemise, trempé jusqu’aux os, tremblant de tous ses membres, après avoir parcouru cette distance de 36 milles, et qui allait se coucher sans un morceau de pain, en attendant que le capitaine de quelque navire lui permît par charité de s’embarquer.

Ainsi, dans la détresse qui pèse depuis quelques années sur le travail, les hommes vont de la terre à la mer, et du commerce aux manufactures, et Liverpool est le lieu où se font ces perpétuels reviremens.

Une autre conséquence de la nature flottante de la population à Liverpool est la multiplicité des lieux de divertissement et de débauche, des salons, des cabarets et des maisons de prostitution, avec leur cortége obligé de vols et d’excès. Suivant un document publié en 1836, il existait à Liverpool 1,600 débits de liqueurs spiritueuses (public houses), 70 restaurans de bas-étage (taps), 585 débits de bière, 20 salons, et 300 maisons qui renfermaient 1,200 prostituées. Le nombre des débitans de genièvre et de whiskey a quelque peu diminué depuis les prédications du père Mathieu, qui ont ramené au régime de l’eau pure et du thé une certaine quantité d’Irlandais. Liverpool en renferme cependant proportionnellement plus que Londres et les comptoirs du gin y sont tout aussi brillans. Dans ces longues salles où l’on a prodigué les glaces, les dorures et la lumière, les tonneaux sont rangés d’un côté, et de l’autre les hommes, les