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L’ISTHME DE PANAMA.

des flots, car, suivant l’historien Juarros, le nom de Honduras fut donné à la baie parce que les sondages ne trouvaient pas le fond de la mer, et qu’on n’y pouvait jeter l’ancre. Les montagnes sont ainsi rangées en cirque autour de la baie depuis le méridien de l’île d’Utilla jusqu’au cercle de latitude de Balise. Leur élévation mal déterminée est de plus de 2,000 mètres[1]. La Balise, sur les rives de laquelle les Anglais se sont donné un établissement qui, avec l’île voisine de Roatan, les rend maîtres de la baie, s’échappe en bondissant, de cataracte en cataracte, du sein de ces montagnes.

À mesure qu’on s’éloigne de l’Atlantique pour se rapprocher du Pacifique, la surface générale du terrain, abstraction faite des sommets qui s’y dressent comme sur un piédestal, va en montant. En arrière des cimes étalées en double rideau sur le pourtour de la baie, se déploie un plateau qui reproduit sur une moindre échelle l’imposante majesté du plateau d’Anahuac[2], mais en égale, sous un ciel plus délicieux encore, les plus rares magnificences. Il est surmonté de montagnes volcaniques dont la hauteur est évaluée par un observateur exact, le capitaine Basil Hall, à 4,000 mètres. Presque tout droit derrière la tête de la baie de Honduras, sur ce plateau enchanté, lorsque déjà il s’est beaucoup rabaissé, est située, à 500 ou 600 mètres au-dessus de la mer, non loin du Pacifique, la belle cité de Guatimala, au pied de deux volcans les plus beaux à contempler et les plus magnifiquement réguliers dans leur forme élancée qu’il y ait dans l’univers, mais aussi les plus formidables en leur colère. Sans cesse ils menacent la ville : trois fois déjà elle a dû être transportée en masse d’un point à un autre, et jamais les populations n’ont pu consentir à s’éloigner de cette plaine tiède, salubre, admirablement arrosée, où la nature étale toutes les richesses de la végétation, toutes les splendeurs et tous les charmes dont peut être orné un paysage ; elles semblent éperdument amoureuses de ces sites ravissans. Sur le côté méridional de la baie, la chaîne s’incline. Le Golfo Dulce, baie intérieure attenante à la baie ouverte de Honduras, pénètre dans les terres à une centaine de kilomètres, et de son extrémité la plus avancée dans l’isthme jusqu’au Pacifique, il n’y a que 100 kilomètres

  1. Je lis dans un mémoire présenté à l’institut de Washington par M. Wheaton que le pic d’Omoa, qui domine le port du même nom sur la baie de Honduras, est à 1,995 mètres, et le pic de Congrehoy (ou Congrejal) à 1,958 mètres. Ces deux montagnes sont sur le bord méridional de la baie, là où la chaîne qui la borde cesse d’être continue et laisse des ouvertures.
  2. C’est le nom du Mexique dans la langue des Aztèques.