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faveur adoucit, et qui ne sont pas assez sincères pour oser s’avouer. Il est vrai que nous vivons dans un temps d’indiscrétion où nul ne peut compter sur le secret, même dans les choses qui le veulent impérieusement, dans un temps de ménagemens et de compromis où l’on craint de se faire des ennemis ; mais ces mœurs complaisantes et lâches ne doivent pas être encouragées : il faut habituer les dépositaires de l’autorité à en supporter le poids comme ils en recueillent les profits. Quand un ministre est appelé à faire une nomination qui attachera à l’état un serviteur nouveau et exclura peut-être vingt concurrens dont l’aptitude est certaine, aucun renseignement n’est superflu, aucune vérification n’est trop minutieuse. Point d’examens ; toutes les fonctions n’en comportent pas, tous les candidats ne sont pas disposés à cette épreuve réservée aux débutans. Celui qui exerce déjà une fonction subit un examen permanent ; il suffit de tenir une note exacte de ses travaux, d’en conserver la trace, d’en indiquer avec précision le nombre et la valeur : c’est à la fois un sujet perpétuel d’émulation dans l’œuvre de chaque jour et un moyen certain d’appréciation quand vient le jour d’une promotion. Cette promotion sera elle-même précédée d’une présentation du chef intermédiaire appuyée sur des faits précis et circonstanciés, et la nomination, après de telles précautions, pourra difficilement méconnaître les droits de la capacité et des services déjà rendus. Voilà les règles que nous réclamons, et nous ne croyons point qu’elles contrarient aucun intérêt légitime de l’administration. Peut-être écarteront-elles la sottise en crédit et l’intrigue remuante ; mais qui stipule au nom de la sottise et de l’intrigue ? Dans les emplois qui n’appartiennent point à la hiérarchie d’un service organisé, d’autres dispositions doivent être adoptées. Les présentations des conseils des établissemens, celles de l’Institut dans les fonctions où il est en état d’apprécier les candidats, offrent des garanties satisfaisantes. Nous les préférons notamment aux concours, bons pour les jeunes aspirans à l’entrée de la carrière, imparfaits et trompeurs dans les emplois qui conviennent à des hommes plus âgés, à des hommes quelquefois déjà célèbres, et peu disposés à jouer leur réputation dans les hasards de ces luttes épineuses, et à s’exposer à perdre en quelques heures le fruit des travaux de toute une vie.

Telle est, à notre avis, la conduite générale que l’administration doit s’imposer dans les nominations aux emplois intermédiaires : elle diffère peu des procédés actuellement suivis dans plusieurs services publics ; mais il en est où l’on repousse toute gêne, où l’on prétend que l’arbitraire doit être entier. On place dans ce régime exceptionnel la diplomatie,