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d’y voir entrer leurs membres, un juste sujet d’émulation. Ce grand corps a reçu, dans ces derniers temps surtout, des attributions très élevées qui lui donnent une part réelle dans le gouvernement, et qui ne permettent pas plus de le composer de simples comptables, habiles seulement à vérifier des chiffres, que de personnages politiques étrangers aux questions de comptabilité. A toutes les époques, le rôle de la cour des comptes a été considérable, et l’on a compris la nécessité d’y encourager, par l’espoir de l’avancement, le zèle des rangs inférieurs. Nous en trouvons la preuve dans des lettres-patentes du 18 août 1406, qui ont pour objet de décider que des clercs de la chambre des comptes seront appelés à remplir les charges de conseillers maîtres ; elles s’appuient sur l’ancien usage suivant lequel, en cas de vacances, les places de maîtres des comptes étaient données, sur la présentation de la chambre, à ceux « qui longuement avoient servy et qui savoient et cognoissoient les besoignes, et par ainsi les autres clercs de moyen âge, considérans lesdittes rémunéracions, estoient plus encouragez de travailler et pener diligemment on dit fait, pour parvenir et avoir ce degré ouquel aucun ne peut gueres estre expert se il n’a longuement exercé le fait, et par ce en estoient les besoignes et affaires mieulz soutenuez et serchéez. »

Telles sont les règles générales qui régissent ou qui, selon nous, devraient régir la composition du personnel des services publics. Si nous considérons les faits, il faut reconnaître que la plupart de ces services sont soumis à des dispositions sages et tutélaires. Quand on étudie de bonne foi et sans esprit de parti l’administration française dans ses innombrables détails, on y aperçoit, malgré des abus toujours trop nombreux, mais inévitables, un esprit d’ordre incontestable et un système de garanties qui oppose de solides obstacles aux excès de l’arbitraire. De mauvais choix ont introduit dans les fonctions publiques des hommes qui ne méritaient point ou qui méritaient peu d’y entrer ; mais ces erreurs regrettables ont été plus éclatantes que nombreuses. Ce n’est pas une raison pour en permettre le retour c’en est une pour ne pas condamner trop sévèrement un régime qui a plus arrêté que permis de tels écarts. Nous avons indiqué les moyens propres à le compléter ; ils se réduisent à un certain nombre de dispositions simples, dont l’application n’est pas aussi difficile qu’on le suppose. Ces dispositions ne nous paraissent point de nature à être formulées en loi, comme l’avaient demandé les auteurs de la proposition dont nous avons déjà parlé. Une telle loi devrait embrasser trop de situations différentes : si elle voulait être rigoureuse pour prévenir