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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/1071

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de Turin et de Naples retentissaient dans la Lombardie, ses rédacteurs furent dispersés dans l’exil et dans les prisons. Le Spielberg recueillit celui qui en avait conçu l’idée, Silvio Pellico, et le jeune auteur de Francesca da Rimini alla expier dans un silence de dix ans ses nobles désirs et ses espérances. L’Anthologie de Florence a été sans aucun doute un des plus sérieux essais de littérature périodique de ce temps, et par une fortune singulière, due à un gouvernement plus doux, elle a vécu douze années environ, de 1819 à 1832, jusqu’à l’heure où l’Italie s’agita de nouveau, et où chaque parole pouvait devenir une étincelle propre à enflammer les cœurs. Un homme bien intentionné, M. Vieusseux, avait réuni autour de lui, à Florence, quelques écrivains éminens, qui formaient comme une libre famille de penseurs. MM. Zannoni, secrétaire de l’académie de la Crusca, Giordani, Sestini, Niccolini, Tommaseo, prirent part à l’Anthologie, M. Libri fut appelé à lui prêter son concours. Sans avoir la fougue du Conciliateur, l’Anthologie était ouverte à toutes les tentatives généreuses, à toutes les vues élevées et hardies, et prenait chaque jour une importance plus grande, après les hésitations du début. Il y a de remarquables pages de Romagnosi ; les questions de droit naturel, de philosophie, d’instruction publique, donnaient lieu à des études où apparaît un légitime désir de perfectionnement. La France surtout, dans l’Anthologie, était l’objet d’une préoccupation constante ; les cours de MM. Guizot, Cousin, Villemain, y étaient suivis et attentivement analysés. Les idées de Merder y trouvaient aussi de l’écho, et venaient naturellement rejoindre les théories historiques de l’auteur de la Science nouvelle. Dans les discussions littéraires, qui occupaient une large place, l’Anthologie appuyait le principe d’une rénovation dans les arts, dans la poésie, dans le drame, dans le roman, mais avec la prudence d’un goût sévère qui répugne également aux audaces emportées jusqu’au-delà du but et aux stériles prescriptions de règles étroites. Tel est le sens général de cette œuvre collective, et, il faut l’ajouter aussi, tel est le caractère de l’auteur de Polyxène.

Niccolini a été l’un des collaborateurs de l’Anthologie. Son nom se lie au mouvement littéraire italien ; mais il diffère des autres poètes qui ont assuré par leurs efforts et par leurs ouvrages le triomphe des théories modernes. Il se rattache à la rénovation par le développement invincible de sa pensée, qui tend toujours à s’agrandir, sympathise avec toutes les conquêtes de la raison humaine, et éprouve sans cesse le besoin du vrai ; il s’en éloigne par une réserve qui ne l’abandonne jamais dans ses hardiesses, par un goût qui s’effraie aisément de la