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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/113

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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE À NINIVE.

leurs habitudes de polychromie, ont moins obéi à un goût qui leur était propre, qu’ils n’ont voulu suivre un genre de décoration déjà adopté en Orient ; ils complétaient ainsi les emprunts qu’ils ont faits à l’art oriental pour les autres élémens de leur architecture ou de leur sculpture. Sans doute cet art a été profondément modifié par leur génie, mais on ne peut sans injustice leur accorder l’honneur d’avoir imaginé le principe.

Pour en revenir à Ninive, je ne trouve pas surprenant qu’on y ait pratiqué le même système de coloration qu’en Égypte ; c’est encore une conséquence de l’esprit d’imitation dont l’influence se révèle dans tous les grands monumens exécutés par les Assyriens. Je n’oserais point avancer que les murs des palais de Khorsabad étaient entièrement coloriés, et, à cet égard, je suis dans le doute. Il est possible que certaines parties seulement des bas-reliefs aient été peintes, et qu’afin de produire plus d’effet, en laissant la pierre dans un état naturel sur les grandes surfaces, on n’ait colorié que quelques détails ; cependant je ne le pense pas. Il est vrai que les tons retrouvés se remarquent principalement sur les armes des guerriers ou les harnais des chevaux ; mais on ne peut conclure de cette particularité que ces places soient les seules que l’on ait eu l’intention de colorier ; puis il est fort probable que les couleurs retrouvées avaient été obtenues au moyen d’oxides métalliques qui les ont rendues solides, tandis que les couleurs perdues, provenant de végétaux, ont dû offrir moins de résistance à l’action du feu ou de l’humidité. J’ai d’ailleurs reconnu sur certaines plaques sculptées assez d’autres fragmens de couleur pour croire que la surface des bas-reliefs a dû être, en totalité, couverte de peinture ; car j’ai vu des coiffures et des tuniques encore teintées de rouge de deux nuances, l’une se rapprochant du pourpre, l’autre jaunâtre, ayant toute l’apparence du minium. Comme on remarque particulièrement cette nuance sur la tiare ou le bandeau royal du souverain, il est permis de croire que la couche rougeâtre retrouvée sur ces ornemens distinctifs de la royauté n’était autre chose qu’une préparation destinée à recevoir une application d’or. En continuant avec soin mon examen au sujet de cette coloration générale, je me suis aperçu en beaucoup d’autres endroits, et sur les murs des façades, où l’incendie a fait moins de ravages, que le fond de la pierre conservait encore une teinte d’ocre, et que les visages des personnages, ainsi que leurs membres nus, paraissaient participer de ce même ton d’ailleurs assez léger. Une des particularités les plus remarquables de la coloration des figures est le soin avec lequel ont été