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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/1151

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peut dire de cette adjudication qu’elle a été une sorte de concession directe, mais une concession faite au grand jour, d’après des bases déterminées par les pouvoirs publics, et pleinement acceptées par l’opinion.

Laissons maintenant le chemin du Nord à ses destinées, à son avenir politique et commercial, aux fureurs vraies ou fausses qu’il soulève, à l’ivresse qu’il excite à la Bourse, et parcourons le cercle du petit nombre d’incidens plus ou moins politiques qui ont signalé cette quinzaine, si agitée par les passions industrielles.

On recommence à parler des élections. On dit que le ministère, encouragé par le succès des élections partielles qui ont eu lieu ou qui se préparent en ce moment dans plusieurs collèges en remplacement des nouveaux pairs, songerait encore à courir la chance des élections générales au mois de novembre. Nous n’ajoutons pas grande foi à cette nouvelle. Quand le ministère s’est résolu, il y a deux mois, à ne pas dissoudre la chambre cette année, il avait fait de mûres réflexions. Il avait consulté les rapports les plus détaillés sur la situation des esprits dans les départemens. Il savait que, malgré les succès diplomatiques qui avaient terminé heureusement la session, l’opinion du pays sur la politique générale du 29 octobre n’était pas sensiblement modifiée, On louait le ministère d’avoir habilement conclu l’affaire du droit de visite et celle des jésuites ; mais on louait aussi l’opposition d’avoir préparé ce double succès par la prudence de ses conseils, par la persévérance qu’elle avait mise à combattre et à redresser les tendances du ministère. Or, depuis ce temps, il ne s’est rien passé qui ait pu changer les dispositions des collèges. A l’intérieur, la loi des patentes, dont l’effet général n’est pas encore exactement apprécié, a porté l’irritation dans un assez grand nombre de localités. Sur la question de l’enseignement, les intentions du ministère semblent assez équivoques. L’esprit du clergé paraît s’enhardir et ne pas être suffisamment contenu. Parmi les questions administratives qui seront portées l’année prochaine à la tribune, celle de la marine, récemment compliquée par l’incendie de Toulon, occupe sérieusement les esprits. Au dehors, l’intervention de notre diplomatie dans l’affaire du Texas n’a pas été heureuse. Du côté de Taïti, rien n’est venu prouver que le protectorat fût un système sagement inventé pour l’honneur et l’intérêt de la France. Du côté du Maroc, la présence d’Abd-el-Kader sur les frontières de l’Algérie, et les nouvelles forces dont il dispose, ne prouvent pas que le traité conclu avec Abderrahman nous ait assuré tous les avantages que nous pouvions attendre du bombardement de Mogador et de la bataille d’Isly. De tout cela, il résulte une situation au moins douteuse pour le cabinet. L’opposition n’a pas perdu toutes ses chances de succès, et puisque le ministère a jugé prudent, il y a deux mois, de ne pas tenter cette année la fortune électorale, il est probable qu’il persévérera jusqu’au bout dans cette résolution.

Les esprits commencent à se calmer sur le compte du maréchal Bugeaud. On a cessé d’incriminer violemment ses actes et ses systèmes ; des injures on