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Le 5 septembre 1519, nouvelle bataille ; les indiens sont nombreux, pleins de ressentiment. Cortez fait un appel à la foi de sa troupe. « Dieu est avec eux ; Dieu veut que la croix soit plantée dans ces belles régions ; comment le serait-elle s’ils lâchaient pied ? » Il leur a donné des instructions intelligentes pour tirer le meilleur parti de leurs armes européennes. Les deux armées s’ébranlent. La victoire était indécise, lorsqu’un des chefs indiens, qui avait eu une querelle avec Xicotencatl, s’éloigne avec ses soldats, entraînant un autre chef dans sa fuite préméditée. Xicotencatl tient bon quatre heures de plus et bat en retraite sans être poursuivi. Cortez alors renouvelle ses propositions de paix. La réponse fut une attaque de nuit. Heureusement Cortez a accoutumé ses hommes à être toujours prêts ; jamais leurs armes ne les quittent, ils dorment en ordre de combat, et des sentinelles vigilantes gardent le camp. Cette nuit, par bonheur, il faisait clair de lune. Les Tlascaltèques échouent donc encore une fois, et Cortez envoie des Indiens porteurs de paroles de paix, non plus au général ennemi, mais bien à la ville de Tlascala même. La proposition est favorablement écoutée. Une ambassade solennelle part pour aller trouver Cortez. L’obstiné Xicotencalt la retient dans son camp et se prépare à prendre sa revanche. Chez les Espagnols, pendant ce temps, le découragement a pénétré ; ils comptent leurs morts et leurs blessés ; ils voient leur général rongé par la fièvre. Ils souffrent du froid dans cette partie élevée du plateau où ils couchent à la belle étoile. On se dit de l’un à l’autre que l’idée d’aller jusqu’à Mexico est une folie. Le parti de Velasquez se réveille, et une députation de mécontens va présenter au général les griefs de l’armée. « Il se peut que la nature soit contre nous, mais Dieu est plus fort que la nature, répond Cortez. » Il leur cite un vers d’une vieille romance dont le sens est qu’il vaut mieux mourir avec gloire que vivre dans le déshonneur. Ces autres grognards se calment, et peu après des gens de Tlascala paraissent avec des enseignes blanches en signe de paix : ils apportent des provisions de la part de Xicotencatl. La joie se répand dans le camp. Cependant Marina, qui les a observés de près, avertit Cortez que c’est un stratagème et qu’ils sont envoyés pour l’espionner ; Cortez en acquiert la preuve et renvoie aussitôt à Xicotencatl ses émissaires après leur avoir fait couper la main. C’est ce que César avait fait bien plus injustement, lors du siège d’Alesia, contre des gens qui n’étaient pas des traîtres. « Rapportez à votre général, leur dit Cortez quand on les jeta hors du camp, qu’il peut venir de jour et de nuit, quand il voudra et comme il le voudra, et il verra qui nous sommes. » A la vue de ses émissaires mutilés,