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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/285

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nécessaire dans le tonnage des deux voies, et par suite des conditions très différentes pour le péage.

Prenons les chiffres tels qu’ils sont. Le tonnage du chemin de fer étant donc de 650,000 tonnes (et nous faisons volontairement abstraction des voyageurs), et l’intérêt de la mise de fonds ainsi que l’entretien de la voie exigeant par hypothèse un prélèvement total de 20,000 francs par kilomètre, on voit que le droit à percevoir à titre de péage n’est que de 3 centimes par kilomètre et par tonne, tandis que le canal de Givors ne transportant que 200,000 tonnes, il est clair que, pour obtenir la somme de 12,000 francs qui forme le montant présumé des intérêts de la mise de fonds et de l’entretien de la voie, il ne peut pas, sans se constituer en perte, abaisser le chiffre du péage au-dessous de 6 centimes par kilomètre et par tonne. Telle est l’inégalité de taxation que la situation seule commande sans que le mérite propre de chacune des deux voies puisse l’effacer. De là plusieurs conséquences fort importantes.

Et d’abord, quant au fait particulier dont il s’agit, on voit que, bien examiné, il conduit à des conclusions diamétralement contraires à celles qu’on en a tirées précédemment. On a dit : Le chemin de Saint-Étienne a forcé le canal de Givors à baisser ses tarifs, il a réduit presque à rien ses bénéfices ; donc le chemin est supérieur au canal. Eh bien ! supposez seulement les deux voies égales en puissance, qu’arrivera-t-il ? C’est que le chemin de fer pouvant, grace aux immenses débouchés qui lui sont propres et que son rival ne peut pas lui disputer, se contenter d’un péage beaucoup moindre, la lutte serait déjà par cela seul fort inégale. En outre, comme le premier pourrait encore, sur la ligne unique où ils se rencontrent, s’imposer momentanément quelques sacrifices sans cesser de réaliser des bénéfices dans d’autres directions, tandis que les pertes sur le canal seraient sans compensation possible, il est évident que le chemin de fer attirerait à lui sans grand effort tout ce qui reste à la circulation de son rival. Si le canal de Givors se soutient néanmoins dans une situation