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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/383

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ment remarquables. Que de projets de lois votés sans discussion ! Que de millions généreusement accordés ! Que de chemins de fer précipités dans le gouffre de la Bourse ! L’heureux temps que les derniers jours d’une session pour faire passer cette loi si nécessaire, que l’on appelle le budget ! Nous ferons comme les chambres ; nous glisserons sur toutes ces questions importantes, qu’un examen superficiel a tranchées ou écartées, sauf à les étudier de nouveau et à les discuter plus mûrement dans des temps plus propices, questions de finances et de politique, comme le dégrèvement de l’impôt du sel, la réduction du timbre des journaux, la réforme postale, l’établissement des impôts de luxe ; questions administratives, comme la création d’une demi-douzaine de chemins de fer, la restauration de Notre-Dame de Paris, si vivement réclamée par M. Léon de Maleville, la seconde loi des colonies, relative aux essais d’émancipation, enfin les crédits d’Afrique et l’établissement d’un comptoir à Alger, question très controversée, et dont la solution a peut-être été trop rapide. Nous ne parlerons pas de l’horrible épisode qui jette un voile si sombre sur l’expédition de Dahra ; espérons que cet affreux récit sera démenti. Des bruits ont transpiré sur les mécontentemens fort justes exprimés par le maréchal-gouverneur au sujet de la nouvelle organisation civile de l’Algérie. C’est un sujet qui doit être traité avec étendue, et sur lequel nous reviendrons. L’intérêt de la France est de ne pas affaiblir en ce moment les moyens militaires du gouvernement de l’Afrique. Toute mesure qui tendrait à ralentir l’action de l’armée, à gêner ses mouvemens, à entraver sa marche, serait condamnée hautement par l’opinion. Que serait-ce si les motifs les plus frivoles, si des raisons qu’on ne peut avouer étaient la principale cause des modifications récentes apportées dans le régime civil de la colonie ? Du reste, si le maréchal-gouverneur s’exprime avec sa franchise accoutumée sur les mesures dangereuses qu’on lui impose, il paraît qu’ici on ne l’épargne guère. Nous espérons que cette lutte s’apaisera d’elle-même, et que le ministère du 29 octobre n’oubliera pas la reconnaissance qu’il doit au duc d’Isly.

Et les élections, et les nouveaux pairs ! Les élections se feront-elles au mois de novembre, ou dans un an, ou dans deux ? Nous pourrions faire là-dessus des raisonnemens à perte de vue ; nous en dispenserons nos lecteurs. Il est évident pour tout homme sensé que le ministère lui-même ne sait pas encore ce qu’il fera. Quant aux nouveaux pairs, c’est un sujet sur lequel nous aurions bien quelque chose à dire ; mais pourquoi parler des douleurs de M. le chancelier ? Le ministère ne les connaît-il pas aussi bien que nous ? D’ailleurs, quand on vient de terminer l’affaire du droit de visite et la question des jésuites, peut-on s’inquiéter des désagrémens que l’on cause à la pairie ? Nous conseillons à la pairie d’être modeste, puisqu’on veut qu’elle le soit ; nous lui conseillons de conformer ses sentimens à sa fortune. Cela est triste, mais c’est le meilleur parti qu’elle ait à prendre.