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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/528

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où les difficultés semblent disparaître. Le principe est l’association. Une fois admis, toutes les solutions en découlent comme par enchantement. L’argent manque aux colonies ? On fait affluer les capitaux européens en mettant la propriété coloniale sous la garantie du gouvernement, en mobilisant des fortunes qui jusqu’alors ne pouvaient être ni divisées ni transmises. Il est à craindre, disent les partisans de l’esclavage, que les nègres affranchis ne se refusent au travail. M. Lechevalier les captive de nouveau par les liens de l’intérêt personnel. Il leur assure en minimum les nécessités de la vie, et leur offre en outre l’appât d’une large participation aux bénéfices. La rançon des esclaves cesse également d’être un embarras. Il y a présentement dans nos colonies une déperdition déplorable de ressources, par suite de la rareté et du prix excessif de l’argent, par suite des procédés vicieux de la fabrication. N’est-il pas évident que, si on y attirait les capitaux, si on y introduisait les méthodes éprouvées en Europe, si l’on multipliait les travailleurs en réhabilitant le travail, on obtiendrait un surcroît de produits assez considérable pour compenser le sacrifice de l’indemnité ?

La base du système est, comme nous l’avons déjà dit, l’exploitation en commun avec le concours des capitaux de la métropole, substituée à une industrie morcelée et nécessiteuse. Par exemple, une de nos colonies étant choisie pour lieu d’expérience, on suppose une compagnie formée par l’accord des propriétaires du sol, d’un certain nombre de capitalistes et du gouvernement. Les premiers apporteraient dans l’association leurs terres, leurs esclaves, leur matériel ; les seconds fourniraient l’instrument du travail, l’argent ; l’état n’engagerait que son crédit, c’est-à-dire qu’il garantirait aux actionnaires, sur l’ensemble du fonds social, un minimum d’intérêt de 4 pour 100 au plus. Or, comme l’industrie coloniale, toute défectueuse qu’elle est aujourd’hui, produit en général beaucoup plus de 4 pour 100 sur le capital engagé, il est certain qu’elle rapporterait davantage encore après avoir reçu les perfectionnemens désirables, et qu’en conséquence la garantie du gouvernement serait purement nominale.

Si séduisante que soit cette combinaison, il y aurait de la témérité à la mettre à l’épreuve sur une trop grande échelle. Il serait effrayant d’offrir la caution de l’état pour une somme égale au revenu total de nos quatre colonies à esclaves. Ici comme pour les chemins de fer, l’intervention du gouvernement n’est nécessaire qu’au début pour lancer les capitalistes dans la voie féconde des spéculations maritimes. Par un hasard des plus heureux, une grande expérience nationale peut