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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/56

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et avec une grande imprévoyance ; mais les mauvais effets de la loi n’allaient pas au-delà.

Depuis le changement opéré en 1835, la prostitution est entrée dans les mœurs. Les jeunes gens, ne courant plus aucun risque personnel, se font un cruel passe-temps de perdre les jeunes filles. Le garçon de ferme qui a séduit sa compagne de travail lui persuade de se réfugier, au terme de sa grossesse, dans le dépôt de mendicité. Celle-ci relève à peine de couches, que le séducteur la laisse là ; que s’il est actionné par les gardiens de la paroisse, ou poursuivi par l’indignation publique, il quitte le pays et va chercher du travail dans les mines ou dans les ateliers industriels. Le père abandonne la femme, et la mère abandonne l’enfant ; c’est la paroisse qui recueille le fardeau. Les trois quarts des enfans que reçoivent les dépôts de mendicité dans le pays de Galles sont des enfans illégitimes et que leurs parens délaissent. La famille tombe ainsi en désuétude ; un grand nombre des naissances ont lieu hors mariage, et l’on cite des femmes qui ont eu successivement jusqu’à neuf bâtards. L’ancienne loi était immorale, car elle encourageait la jeune fille à se prostituer, en faisant tourner nécessairement à son profit les conséquences de son inconduite : la nouvelle loi est inhumaine, car elle ajoute à la responsabilité de la femme, sans augmenter ses moyens de résistance et sans diminuer les tentations dont sa vertu est entourée.

La législation de l’Angleterre sur les secours publics gêne et révolte les gens du pays de Galles ; mais la taxe des barrières est, de toutes les importations britanniques, celle qui fait peser sur eux la plus dure oppression. Je comprends que, dans les pays riches, qui s’étendent en plaines fertiles et qui abondent en populeuses cités, le système des péages soit préféré pour l’entretien des routes. Cette taxe prend alors le caractère d’un impôt de consommation : ceux qui dégradent les routes paient seuls pour les réparer, et dans la proportion du dommage ; et, comme la circulation est active, l’on n’a pas besoin de multiplier les barrières ni d’élever le taux des péages jusqu’à les rendre onéreux pour les transports. Voilà le système qui devait réussir et qui a réussi, en effet, en Angleterre ; mais, dans une contrée pauvre, hérissée de montagnes et coupée de torrens, le problème de la circulation se présente sous un tout autre aspect. Il y aurait une véritable injustice à défrayer l’entretien des routes, au moyen d’un péage, attendu que la dégradation des chaussées, dans ces régions élevées, provient beaucoup moins du passage des transports que de l’action des élémens et de l’influence des saisons. Joignez à