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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/57

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cela que, les routes étant peu fréquentées, il faudrait, si l’on voulait obtenir un revenu qui suffît pour les frais d’entretien, faire supporter au roulage, aux voitures publiques, aux charrois de l’agriculture, un impôt hors de proportion avec les facultés du contribuable et avec l’importance du service rendu.

Le pays de Galles a manqué long-temps de routes carrossables. Pour exécuter celles qui existent aujourd’hui et qui sont fort belles, les comtés ont dû emprunter ; car l’état n’a pas fait pour les Gallois ce qu’il avait fait pour la Haute-Écosse, où les grandes lignes de communication furent tracées au moyen d’une subvention accordée par le parlement. Il arrive donc souvent que le produit des péages sert à payer les intérêts de la dette, et que la paroisse est encore obligée de s’imposer pour subvenir à la réparation des routes. La forme adoptée pour la perception des péages concourt aussi à rendre la taxe plus onéreuse à la population. Les commissions (trusts) qui administrent les routes afferment les droits de barrières à des prix très élevés, grace à la concurrence effrénée que se font les entrepreneurs. L’argent abonde ainsi dans les caisses locales ; mais les traitans, qui veulent retrouver leurs déboursés, multiplient les barrières, exagèrent les tarifs, et pressurent le menu peuple. Les chevaux, étant de petite taille, ne transportent que la moitié du poids que traînent les attelages de même nature dans les comtés anglais ; cependant le droit est également de 6 d. par cheval et par distance, et les distances sont plus rapprochées. On a calculé qu’une charge de chaux (la chaux est l’engrais de cette contrée humide), qui vaut 3 sh., prise au four, revenait à 6 sh., par les péages seulement, à une distance de cinq milles anglais. Dans quelques districts, la charge de houille, qui vaut 2 sh. 8 d. sur le carreau de la mine, payait 9 à 10 sh. pour être transportée à huit milles. Il devenait à peu près impossible aux fermiers de se procurer les choses nécessaires à la vie ainsi que les instrumens de travail. Qu’on ne s’étonne donc pas si leur patience a fini par se lasser.

Les commissaires du gouvernement, qui ont reconnu et sondé les plaies de cette population, ne proposent aucune réforme sérieuse. Le gouvernement lui-même, désespérant sans doute de proportionner le remède au mal, se tient dans une inaction absolue. Il a fallu, pour calmer les esprits, que les propriétaires fonciers consentissent, dans certains districts, à la réduction des fermages ; les magistrats locaux n’ont obtenu la suppression de quelques barrières et la diminution des péages qu’en résiliant un certain nombre de baux. Le réveil de l’industrie a fait le reste, en portant jusqu’au fond de ces vallées le