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question doit se débattre ; c’est à Madrid qu’elle doit se trancher. Que la reine isabelle poursuive donc sa route vers ces provinces, ou que, de Sarragosse, elle retourne directement à Madrid, nous ne voyons point qu’il y ait là, un si grand sujet d’alarme.

Nous n’insisterons pas sur le décret par lequel les conseillers de la jeune reine viennent d’abolir la liberté de la presse en Espagne en lui enlevant la garantie du jury. Il est juste de dire que sur un point si délicat le gouvernement de Madrid n’a pas eu la prétention d’établir une situation définitive ; la mesure qu’il vient de prendre sera soumise aux cortès, qui se refuseront, sans aucun doute, à la ratifier. Le gouvernement de Madrid s’est donc préparé là un échec inévitable, mais un échec qui ne peut compromettre son existence, car si grande qu’elle soit, la faute qu’il vient de commettre est compensée par la pacification de la Catalogne, par l’institution récente de ce conseil d’état depuis si long-temps promis, enfin par les efforts tentés à cette heure même pour doter la Péninsule de lois civiles et administratives, et d’un nouveau système d’impôts. Il s’en faut de beaucoup, assurément, que l’œuvre de réorganisation entreprise par le cabinet de Madrid soit de tout point irréprochable, et plus d’une fois déjà nous en avons signalé ici même les incontestables défauts. Telle qu’elle a été conçue, pourtant, elle doit, à la longue, concilier en Espagne au ministère Narvaez les sympathies des vrais amis de la paix et de la monarchie constitutionnelle ; il n’est pas d’obstacle dont ne puissent triompher les gouvernemens qui persévèrent dans la voie des réformes indispensables.


— L’association douanière allemande est l’un des évènemens les plus considérables de notre temps. M. H. Richelot, qui avait écrit sur cette question deux mémoires récompensés par des sociétés savantes, vient de remanier, de refondre ces mémoires, en les enrichissant d’un grand nombre d’observations nouvelles et de plusieurs chapitres entièrement inédits. Le volume qu’il publie[1] n’est donc point un travail fait à la légère ; la variété des aperçus qu’on y rencontre, la richesse des observations et l’abondance des faits ne permettent d’ailleurs aucun doute à cet égard.

M. Richelot remarque avec raison que l’association douanière allemande est un fait nouveau dans le monde. On avait vu la liberté des transactions commerciales étendue à d’immenses territoires, quand ces territoires étaient gouvernés par les mêmes mains ; on n’avait pas vu encore ce fait remarquable « d’un certain nombre d’états n’en formant plus qu’un seul par la législation douanière, tout en conservant leur indépendance, ou, en d’autres termes, de l’unité de douanes sans l’unité politique. » C’est ce fait nouveau que l’auteur examine sous toutes ses faces, dans son origine et ses progrès, dans sa constitution actuelle et ses résultats, dans ses relations avec les faits extérieurs et dans ses conséquences futures. Selon M. Richelot, l’idée d’une association douanière était naturellement suggérée à l’Alle-

  1. L’Association douanière allemande, 1 vol. in-8 », chez Capelle.