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le plateau. Le 7, à la pointe du jour, nous montâmes à cheval, et allâmes visiter nos positions et les travaux sur le Mansourah. Pendant que l’artillerie achevait les plates-formes de la grande batterie royale, située à mi-côte et destinée à prendre d’écharpe les défenses du front d’attaque, on améliora le chemin qui devait y conduire, on adoucit quelques pentes et des tournans trop courts ; cela était nécessaire, car on s’attendait à ne pouvoir transporter des pièces de 24 sur un terrain nouvellement remblayé sans atteler un grand nombre de chevaux. On reconnut avec soin les communications à suivre pour pouvoir amener l’artillerie jusqu’à Coudiad-Aty. Les difficultés étaient grandes ; la reconnaissance du front d’attaque fit voir que depuis la dernière expédition il avait été considérablement ajouté aux moyens de défense de la ville. Les maisons qui formaient une espèce de faubourg devant la porte Bab-el-Djedid avaient été rasées ; les talus en terre qui s’appuyaient sur les roches du pourtour de la place, et auraient pu, en raison de leur élévation, faciliter les moyens d’y pénétrer, avaient été enlevés, de manière à rétablir partout des escarpemens respectables ; un chemin de ronde crénelé, et à double rang de créneaux en certains endroits, couronnait la muraille de la fortification, haute de 8mètres au moins ; on reconnut, sur le front d’attaque, des constructions neuves avec batteries casematées ; on y comptait dix-huit embrasures armées de pièces de bronze ; des créneaux et meurtrières étaient régulièrement percés entre les embrasures.

Toutefois, comme je l’ai dit plus haut, cette enceinte livrait à nos batteries son escarpe vue jusqu’au pied, et sa partie la plus saillante n’était protégée que par des flanquemens d’une action faible et qui ne pouvaient nous résister long-temps. On arrêta donc que c’était là qu’il fallait faire brèche, et dès le soir même on commença à 500 mètres du rempart la batterie de Nemours pour des pièces de gros calibre, seules capables à cette distance de pouvoir agir puissamment contre un revêtement en maçonnerie. On ordonna également une seconde batterie pour des obusiers, sur une terrasse qui dominait à gauche la route de Tunis, à laquelle s’appuyait l’épaulement de la batterie de Nemours.

Vers deux heures, l’assiégé dirigea une sortie contre les positions du général Rulhières ; une foule de Kabyles s’élancèrent hors des portes Bab-el-Djedid et Bab-el-Gharbia, et gravirent au pas de course la colline de Coudiad-Aty. Il est impossible d’attaquer avec plus de détermination que ces sauvages, qui couraient, en poussant de grands cris, au milieu des tombeaux et des ruines, se ruant contre les petits