Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/660

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourra sans danger pour la liberté commune jouir des franchises accordées aux races et aux comitats indigènes. Alors l’établissement du vote universel, qui est le but où tend la noblesse maghyare, deviendra praticable ; alors enfin tous les privilèges sans distinction pourront être abolis. La noblesse hongroise aura fini sa mission, et tout fait espérer qu’à cette époque, qui n’est plus éloignée, elle abdiquera le pouvoir avec joie entre les mains de la nation, devenue majeure et souveraine.

Quelque important que soit en Hongrie le mouvement réformateur, la cour de Vienne s’obstine à feindre à cet égard une profonde indifférence. Le cabinet aulique ne demandait à la dernière diète qu’une seule chose, le vote de l’impôt sur la noblesse : s’il eût obtenu ce vote, il eût volontiers, comme il le déclara dans ses journaux, laissé la diète se prolonger jusqu’en 1845 ; ne l’obtenant pas, il prononça prématurément la clôture. Un gouvernement peut-il témoigner plus ouvertement le peu d’intérêt qu’il attache aux questions sociales ? Cependant la diète hongroise ne s’est point montrée hostile au projet d’imposer les nobles à l’égal des autres sujets du royaume. Cette aristocratie orgueilleuse, qui avait jusqu’à ce jour compté parmi ses plus beaux privilèges celui de ne payer d’impôt à aucun prince de la terre, a accepté volontairement sa part des charges communes. La table des états a voté pour la noblesse un impôt de 25 millions de francs ; mais la table des magnats, en discutant cette question, a demandé que le prélèvement et l’emploi de l’impôt fussent soumis à un contrôle constitutionnel, et que les ministres devinssent responsables pour l’administration de cette partie du budget. Une demande si raisonnable a révolté le cabinet aulique, et l’impôt par conséquent n’a pas été voté. A qui la faute ? Manquant de garanties, la noblesse pouvait-elle sans imprudence abdiquer ses antiques franchises, qu’elle ne doit sacrifier qu’à la patrie ? Aussi, ne doutant plus des intentions despotiques du gouvernement, la diète s’est-elle bornée à répondre aux demandes de son roi par l’offre de 3 millions de florins, et encore à simple titre de subside jusqu’à la diète prochaine. Une pareille offre pour un pays grand comme la Hongrie ressemblait presque à une ironie. N’ayant pas obtenu des représentans la seule chose qui fût dans son intérêt particulier, le cabinet aulique trouva que la diète perdait son temps, et qu’il valait mieux la clore.

Ce fut alors que l’oncle de l’empereur, le vieil archiduc Charles, alla à Presbourg faire un dernier effort en faveur de cette loi sur l’impôt des biens nobles qui est pour l’Autriche une question vitale. Il